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Les quartiers Mênontin, et Ganhi, il y a quelques mois et maintenant Jéricho, avec en prime, à chaque fois, des agents de la Police nationale froidement abattus. Les braquages commencent par lasser, et l’inquiétude grandissante dans les rangs des populations. Face à la situation, le commissaire divisionnaire de Police à la retraite, Marius Dadjo, se confie, et en appelle à la responsabilité des dirigeants actuels de la Police nationale.
Commissaire Dadjo, il n’y a plus aujourd’hui de braquage à Cotonou sans que des agents de la Police ne perdent pas leur vie. Comment expliquer la situation ?
Marius Dadjo : Ce qui se passe aujourd’hui sort totalement de l’entendement. Il est à la fois triste, déplorable et inconcevable. De notre temps, cela ne se passait pas ainsi, sinon très rarement. Il est alors étonnant que ceux à qui nous avons laissé la main, qui étaient ceux-là grâce à qui on tenait la maison ne puissent pas assurer cette sécurité à satisfaction au point où, aujourd’hui, ce sont des collaborateurs qui tombent de façon banale. C’est sincèrement à déplorer.
Au-delà du fait que c’est déplorable, à quoi cela, peut-il être dû selon vous ?
La situation est due, à ce que je peux qualifier de laisser-aller. Peut être une euphorie mal placée, une autosatisfaction d’être mais qui ne devrait, en réalité, pas être. Car, en matière de sécurité, on se remet toujours en cause. C’est un aspect de la vie qui, d’ailleurs est la première nécessité pour tout développement, pour tout être humain, ensuite qui est toujours évolutif. Alors à partir de ce fait, il faut essayer de s’adapter à cette évolution pour apporter la thérapie qu’il faut à chaque fois. De ce fait, je voudrais demander aux responsables en charge de la sécurité aujourd’hui de s’interpeller eux-mêmes et de se poser la question de savoir pourquoi c’est aujourd’hui que cela se passe ainsi. Je dirai tout simplement qu’en fait, les responsables en charge de la sécurité aujourd’hui, prennent d’autres choses comme priorités par rapport à l’élaboration de la politique sécuritaire et à sa mise en application sur le terrain.
Il suffit donc d’élaborer et appliquer une bonne politique sécuritaire pour que tout se passe bien ?
A côté de tout ce que j’ai dit plus haut, il y a également que la formation des agents est certainement, je dirai même sûrement, défaillante. Sinon, on ne peut pas comprendre que des éléments, des RAID, par surcroît, aillent s’offrir gratuitement au carnage. On reprochait tantôt à la Police de ne pas avoir suffisamment de moyens. On a parlé pour le commun des Béninois des gilets anti-balle. Mais ceux qui ont été tués hier sont morts avec des gilets au corps. Alors on comprend bien que même quand on a les moyens et qu’on n’a pas l’intelligence nécessaire, on s’offre comme des bêtes ou des proies faciles à abattre.C’est pour cela que j’en appelle à la conscience des responsables en charge de la sécurité, particulièrement aux responsables de la Police et leur demande de s’interpeller eux-mêmes pour voir ce qui se passe.C’est pratiquement au niveau de la Police que cela se passe, non pas avec la Gendarmerie. J’ai impression qu’ils s’occupent d’autres choses que ce qui devrait les préoccuper ...
Vous parliez tantôt des gendarmes. Ces derniers sont plus dans les milieux ruraux que dans les villes. Ceci n’explique-t-il pas cela ?
C’est la logique d’hier. Depuis quelque temps, en tout cas depuis des années, la Gendarmerie est partout à Cotonou, la Police est partout dans les villages aussi.Mais comment est-ce que la Gendarmerie se gère-t-elle ? Ce à quoi je veux faire allusion est simple. En fait, nous ne pouvons pas mettre en œuvre une politique sécuritaire sans un élément fondamental qui est la collaboration avec la population. Est-ce qu’aujourd’hui, de la Gendarmerie à la population et de la Police à la population, laquelle des deux institutions a plus de cote d’amour auprès de la population ? A partir de ce moment, si c’est dans les grandes agglomérations que les crimes crapuleux du genre de ce qu’on a observé mardi dernier à Cotonou se commettent, la Police n’avait pas intérêt à se mettre à dos cette population qui fort malheureusement se félicite de ce qui arrive à la Police aujourd’hui. Cela veut dire qu’il y a un désamour. Ce que j’avais craint personnellement en criant à tue-tête partout que ces affaires de casque, d’orientation sur les voies locales…. tout cela, c’est de bonne guerre, c’est une bonne méthode qu’on a voulu, pratiquement, forcer les populations à adopter. Mais en réalité, tel que cela a été fait, le positionnement de la Police dans cette entreprise-là n’est pas nécessairement le meilleur. Cela a effrité un peu la collaboration entre la Police et la population.C’est à la Police de se remettre en cause pour être en phase avec la population pour se corriger, afin que les choses retournent dans le bon sens. Pour cela, je demande aux responsables en charge de la Police à tous les niveaux de se remettre en cause, de s’interpeller pour voir comment remedier à la situation. Aujourd’hui, ils ont presque tout. Ils ont de hauts faits d’armes. Sauf qu’on se demande est-ce qu’ils ont oublié ce qu’ils avaient fait pour qu’on en soit là. Ils n’ont qu’à s’interpeller, se remettre en cause pour un meilleur devenir de la sécurité au Bénin en général et à Cotonou en particulier.
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