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Décision de Cassation de la Cour Suprême du Benin : La cour a-t-elle dit le droit ou a-t-elle rendu service ?





Aussitôt après le verdict de la Cour suprême ce vendredi 02 mai 2014, plusieurs personnes ont pris d’assaut les réseaux sociaux, certains pour crier à la victoire et à l’anéantissement des non- lieux, d’autres pour affirmer que tout le dossier d’instruction, c’est-à-dire les enquêtes seront reprises à zéro. J’ai personnellement jugé inutile de leur répondre. Je leur concède l’excuse de l’ignorance. Je suppose, en effet, qu’ils ne sont pas des techniciens avisés du droit.
Mais ce que j’ai entendu ce matin de la bouche des avocats du Chef de l’Etat, n’est rien d’autre qu’une grave injure au gotha judiciaire béninois. Tellement, leurs propos m’ont abasourdi et m’ont rendu davantage inquiet pour notre pays.
C’est pourquoi, j’ai décidé de faire quelques commentaires utiles sur cet arrêt et surtout ce qu’il convient d’en retenir, relativement à ses conséquences de droit. Il ne s’agit pas d’une philippique contre ces avocats tartufes, lesquels se sont signalés par leur impéritie dans la rhétorique de la cassation.
Mais ces développements me paraissent nécessaires et inévitables parce que des étudiants de droit et des stagiaires aux fonctions judiciaires, suivent tous les rebondissements de ces deux dossiers, lesquels ont sérieusement secoué et ce, de façon très grave, la vie judiciaire de notre pays.
Avant d’aborder à proprement parler les précisions qu’appelle cette décision, il me parait important de dire quelques mots sur la compétence de la Cour suprême en matière juridictionnelle.
En effet, la Chambre Judiciaire de la Cour Suprême, en sa qualité de gardienne de l’unité du droit, n’est pas un troisième degré de juridiction. Elle est juge du droit et de ce point de vue, elle ne traite pas le fond de l’affaire. En d’autres termes, elle n’a pas à s’occuper des éléments de fait du dossier. Son rôle se limite essentiellement à contrôler la rectitude juridique des arrêts rendus par les cours d’appel. Elle se prononce sur la légalité des décisions rendues par ces juges du fond. C’est la raison pour laquelle ont dit souvent, parlant de la Cour de Cassation, qu’elle « juge les jugements et non les affaires ».
Il s’ensuit que pour former un pourvoi contre un arrêt de la cour d’appel, la partie intéressée doit expressément indiquer la règle de droit qui est ainsi violée et dont elle réclame le contrôle par la Chambre judiciaire de la Cour suprême. En réalité, son pouvoir doit tendre à faire censurer par la Cour suprême, la non-conformité du jugement à la règle de droit. C’est ce qu’on appelle en procédure civile : « les cas d’ouvertures à cassation ».
Lorsque la Cour constate que la règle de droit a été bien appliquée, elle se contente de rejeter le pourvoi. En revanche, si la règle n’a pas été respectée, elle rend un arrêt de cassation. Deux cas de figures peuvent se présenter. Dans le premier, la Chambre judiciaire, après cassation, renvoie en principe l’affaire devant une cour d’appel autrement composée. C’est « la cour de renvoi », laquelle va bien sûr statuer à nouveau sur l’affaire à la lumière des indications données par les motifs de l’arrêt de la Cour suprême.
Dans le second cas, la Cour peut casser, mais sans renvoi. Il en est souvent ainsi lorsque la cassation n’implique pas qu’il soit, à nouveau, statué sur l’affaire. C’est le cas, lorsque la Cour décide de vider le procès, c’est- à -dire qu’elle estime qu’il n’a plus rien à juger. Il en va ainsi lorsque les faits constatés et appréciés par les juges du fond permettent à la Cour d’appliquer elle-même la règle de droit.
Il s’agira donc de confronter ces prolégomènes de la cassation à la réalité des dossiers d’empoisonnement et de coup d’Etat, afin de pouvoir répondre à la question de départ, celle de savoir si la Cour suprême a dit le droit ou si elle a rendu service à une partie ? Les éléments ci-après nous permettent de répondre à cette question. Il s’agit notamment :
1- La Cour Suprême n’a pas cassé les arrêts qui lui ont été déférés quant au fond. Elle n’a donc pas annulé les dispositions de ces arrêts, lesquels survivent et demeurent, par voie de conséquence, valables. Elle a seulement relevé une question de pure forme, quoique éminemment substantielle, c’est-à-dire le fait pour les juges de la cour d’appel, d’avoir visé l’ancien code de procédure pénale, notamment en ses articles 176, 177,189 et 193, en lieu et place de ceux du nouveau code de procédure pénale, déjà entré en vigueur avant le 1er juillet 2013, date à laquelle la cour d’appel a rendu ses arrêts. Le contenu de ces articles ne varie pas à travers ces deux codes, leur fond étant une copie conforme.
En substance, ils sont relatifs à l’attitude et la nature de la décision que doit rendre le juge d’instruction ou la Chambre d’accusation toutes les fois qu’ils décident, à l’issue de leurs investigations, de retenir ou non les inculpés dans les liens de la prévention des infractions mises à leur charge. Cette erreur de visa commise par la Chambre d’accusation, en dépit de sa gravité, quant à la forme, doit s’analyser comme une erreur matérielle. La Cour suprême a bien fait de relever cela dans sa motivation. En cela, le droit a été dit. 
Mais il est important de préciser qu’il ne s’agit pas des articles du code pénal au regard desquels les infractions : association de malfaiteurs (article 265), tentative d’empoisonnement (article 301) et atteinte à la sureté intérieure de l’Etat (articles 87, 88, 89), ont été analysées. C’est à la lumière de ces articles que les non-lieux ont été confirmés par la Chambre d’accusation. Il convient de signaler que ces articles ne posent pas problème, et aucune erreur de droit n’a été commise à ce niveau par la Chambre d’accusation dans leur utilisation quant au fait de la cause. En tout état de cause, la Cour suprême n’en a rien dit
2- La Chambre judiciaire de la Cour suprême, en ce qu’elle a pour mission principale de tenter d’imposer une application uniforme de la règle de droit sur l’ensemble du territoire, est fondé à exercer un pouvoir disciplinaire sur les cours d’appel. C’est à ce titre que le renvoi après cassation a été prévu, pour qu’elle indique aux cours d’appels ce qu’elles doivent faire, relativement aux dispositions de l’arrêt cassé. Il s’ensuit que le renvoi ne s’impose point lorsqu’aucune disposition de l’arrêt déféré, n’a été annulée quant au fond. En ce cas, la Cour abandonne son rôle disciplinaire et devient un juge pragmatique, soucieux du bon sens, c’est-à-dire de l’efficacité judiciaire.
C’est justement ce qui a manqué aux juges de la Cour suprême qui ont perdu de vue l’obligation qui pèse sur le juge de trancher le litige qui lui est soumis, dans son entièreté. En effet, il ne s’agit pas seulement pour un juge de dire le droit en appliquant la règle de droit, mais aussi et surtout, il lui revient de s’assurer qu’il a tranché, de façon définitive, la contestation qui lui a été soumise. La Cour aurait pu vider ce procès une fois pour de bon, en évitant de procéder à un renvoi fondé sur un motif qu’elle aurait pu, par elle-même, corriger. 
Avec les standards internationaux en matière de procès, le juge se doit de rendre des décisions efficaces.
Au regard des éléments relatifs au délai raisonnable, des procédures judiciaires à la détention prolongée et à polémique des détenus qui ont déjà bénéficié d’un arrêt de non-lieu, la Cour devrait éviter ce renvoi et vider ce dossier. Mieux, le juge ne peut ignorer l’environnement dans lequel il travaille. Certes, il ne doit pas se laisser abattre par les pressions, mais il ne peut rendre sa décision, en faisant fi du contexte dans lequel cette décision est appelée à recevoir application. 
En effet, les juges de la Cour suprême n’ignorent pas que le peuple béninois a besoin d’être fixé une fois pour toute sur ces dossiers qui ont plongé le pays dans une crise socio- politique sans précédent. Elle ne pouvait pas ignorer que renvoyer de tels dossiers à la Cour d’appel pour un simple problème de visa, allait faire revivre au peuple des évènements et des scènes de montage qu’elle se préparait à oublier pour aborder les vrais problèmes de développement. En cela, elle a rendu une décision inefficace, parfaitement peu audacieuse. Elle a, certes, dit le droit, mais elle a beaucoup plus rendu service à la partie civile qui veux jouer au rattrapage, c’est-à-dire aux prolongations. 
Il est important de rappeler que la parte civile consciente que sa cause est perdue à l’avance, avait instruit le Procureur général près la cour d’Appel de Cotonou pour que ces dossiers ne soient pas transmis à la chambre judiciaire. Lesdits dossiers ne l’ont été qu’après les vitupérations des avocats de la défense. Mieux, les avocats de la partie civile alors qu’ils avaient élevé pourvoi ont cependant, introduit devant la Chambre d’accusation un recours en interprétation contre les deux arrêts en cause. C’est à bon droit que la Chambre d’accusation a déclaré ces recours irrecevables. Ces manœuvres aux allures dilatoires des avocats de la partie civile qui n’ont plus rien a fait valoir au fond, devaient être pris en considération par la Chambre judiciaire de la Cour suprême, laquelle devrait vider ce dossier en évitant un renvoi manifestement, en l’espèce, inopportun.
Au demeurant, on peut se demander pourquoi la Cour suprême a mis si tant de temps pour ne retenir qu’un motif relatif à un visa de code et ce, bien après plus de six mois. La montagne a accouche d’une petite souris.
3- Les avocats de la partie civile sont certainement atteints d’une apoplexie intellectuelle. Dans le seul souci de continuer à faire rêver la partie civile, ils ont, au cours de leur conférence de presse de ce jour, versé dans une fourberie tendant à faire croire que tout sera repris à zéro, de même que les enquêtes. Il n’en sera rien. 
En effet, l’arrêt de renvoi de la Chambre judiciaire de la cour suprême est attributif de compétence, c’est-à-dire qu’elle limite la cour de renvoi (la cour d’appel autrement composée), en lui fixant le champ de la matière litigieuse. C’est pourquoi, en règle générale, l’examen de la cause par la cour de renvoi s’étend uniquement aux dispositions censurées et annulées par le Chambre judiciaire. Celles qui n’ont pas été censurées, retrouvent alors leur plein et entier effet. La cour de renvoi ne s’intéresse qu’à tout le dossier que lorsque toutes les dispositions de l’arrêt ont été annulées. Or, dans le cas d’espèce, aucune disposition des arrêts attaqués, n’a été annulée. Si la Cour suprême avait des griefs à faire aux motivations de la Chambre d’accusation, quant au fond, elle aurait pu les faire dans une seule et même décision, c’est-à-dire en même temps qu’elle relève que l’ancien code de procédure pénale a été visé en lieu et place du nouveau.
Au regard de toutes ces considérations, il va sans dire que la Cour de renvoi est essentiellement confinée dans un rôle essentiellement simpliste et consistant à remettre à leur place les articles qui font défaut. Elle outrepasserait ses compétences si elle procédait à un nouvel examen des faits de la cause, ce qui constituerait une insécurité judicaire préjudiciable aux parties au procès, et partant, une mauvaise administration de la justice. Mais cela m’étonnerait beaucoup. Et si cela se passait, il vaut mieux fermer les facultés et écoles de droit au Bénin. Même dans ce cas, puisque le ridicule ne tue pas dans mon pays, les non-lieux resteront toujours non-lieux. Il en est ainsi parce que le droit est universel, quand bien l’appréciation d’un dossier d’instruction peut varier d’un juge à l’autre.
Telle est ma conviction profonde.
Julien Ahouandjinou

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