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La structuration de l’économie nationale entreprise depuis 2016 par le gouvernement de Patrice Talon, à travers l’assainissement du climat des affaires, la mise en place d’une fiscalité attractive pour les investisseurs ainsi que la création des zones économiques spéciales , place l’Etat du Bénin parmi les nations en progression et à forte croissance économique en Afrique. Mais l’absence d’un code sur le droit pénal des affaires demeure un véritable handicap.
Judicaël ZOHOUN
Le traité de l’Ohada ne dispose d’aucun acte uniforme sur le droit pénal des affaires. Des dix sept pays africains signataires du traité, seuls les États du Sénégal, du Cameroun et de la Centrafrique disposent d’un droit pénal des affaires.
D’une manière générale, on peut définir le droit pénal des affaires comme l’ensemble des règles de droit relatives aux infractions pénales susceptibles d’intervenir dans la vie des affaires, ainsi que l’ensemble des règles économiques pouvant être pénalement sanctionnées.
En clair, l’objet du droit pénal des affaires est de sanctionner les infractions les plus nuisibles au climat des affaires. C’est donc un précieux outil de développement qui participe de la lutte contre l’insécurité juridique et judiciaire. L’absence d’un tel instrument dans nos états est nuisible aux investissements directs étrangers.
Pour ses ambitions, l’Etat du Bénin qui ne dispose pas d’un tel arsenal a un défi majeur à relever .
Une insuffisance nuisible
La mise ne place d’un cadre législatif spécifique sur le droit des affaires devient une priorité. Comment assainir le monde des affaires afin de discipliner tant soit peu les opérateurs économiques dont les moyens usités pour réaliser les bénéfices ne sont pas toujours les plus recommandés ?
Comment contrer la délinquance économique en expansion continue, ou sanctionner les auteurs de pratiques déshonorantes pour la vie des affaires à travers des comportements prohibés par la loi ?
C’est le nouveau défi qui attend le Bénin car une action ou une abstention, si préjudiciable qu’elle soit à l’ordre social, ne peut être sanctionnée par le juge que lorsque le législateur l’a visée dans un texte et interdite sous la menace d’une peine. Et c’est cette insuffisance qui profite aux délinquants en col blanc.
Il n’y a pas d’infraction, ni de peine sans un texte légal. Et dans un climat comme celui des affaires en proie à toutes les ingéniosités, la mise en place d’un cadre juridique spécifique s’impose.
Même si plusieurs infractions sont évoquées dans le nouveau pénal du Bénin et divers lois contre la corruption et l’enrichissement illicite, il sied de les compiler dans une loi unique avec une clarification claire et approfondie.
Quelques infractions à définir
Plusieurs infractions sont à définir dans le code pénal des affaires. On peut citer : L’abus de biens sociaux, l’abus de confiance, l’escroquerie, la banqueroute, la corruption, le trafic d’influence, le faux, le travail dissimulé, la pratique commerciale trompeuse, la fraude et le blanchiment.
L’abus de biens sociaux
L’abus de biens sociaux est une infraction prévue par deux articles du Code de commerce, qui distingue selon les types de sociétés : SARL ou SA.
Cette infraction consiste à « faire, de mauvaise foi, des biens ou du crédit de la société, un usage qu’ils savent contraire à l’intérêt de celle-ci, à des fins personnelles ou pour favoriser une autre société ou entreprise dans laquelle ils sont intéressés directement ou indirectement ».
En effet, les dirigeants sociaux ne doivent jamais confondre leurs propres biens avec ceux de la société. Ils doivent respecter la finalité juridique de leur pouvoir de gestion.
En outre, l’abus n’a pas à causer nécessairement un préjudice. Il suffit que l’acte fasse subir un risque anormal à la société.
L’abus de confiance
« L’abus de confiance est le fait par une personne de détourner, au préjudice d’autrui, des fonds, des valeurs ou un bien quelconque qui lui ont été remis et qu’elle a acceptés à charge de les rendre, de les représenter ou d’en faire un usage déterminé. »
En effet, le dirigeant d’entreprise se voit souvent reproché d’avoir détourné des fonds qu’il avait reçu en qualité de mandataire.
L’escroquerie
« L’escroquerie est le fait, soit par l’usage d’un faux nom ou d’une fausse qualité, soit par l’abus d’une qualité vraie, soit par l’emploi de manœuvres frauduleuses, de tromper une personne physique ou morale et de la déterminer ainsi, à son préjudice ou au préjudice d’un tiers, à remettre des fonds, des valeurs ou un bien quelconque, à fournir un service ou à consentir un acte opérant obligation ou décharge. »
L’escroquerie est généralement caractérisée par des manœuvres frauduleuses dont la finalité est de procurer des fonds à l’entreprise. Les manœuvres frauduleuses peuvent se traduire par exemple par la présentation de bilans falsifiés pour obtenir des prêts auprès d’une banque, ou encore la réalisation d’une augmentation fictive de capital aux fins de tromper un prêteur éventuel.
Les manœuvres doivent avoir été déterminantes dans la remise des fonds ou de valeurs ou dans la fourniture de services.
Il s’agit d’une infraction intentionnelle, donc l’intention du dirigeant doit impérativement être établie.
La banqueroute
La banqueroute est une infraction applicable dans les situations d’entreprise en difficulté, c’est-à-dire lorsque la société fait l’objet d’une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire. En effet, le dirigeant de l’entreprise peut voir sa responsabilité pénale engagée, notamment lorsqu’il tarde à déclarer l’état de cessation des paiements ou lorsqu’il dissimule sa constatation.
Cette infraction prévoit plusieurs faits :
« 1° Avoir, dans l’intention d’éviter ou de retarder l’ouverture de la procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire, soit fait des achats en vue d’une revente au-dessous du cours, soit employé des moyens ruineux pour se procurer des fonds ;
2° Avoir détourné ou dissimulé tout ou partie de l’actif du débiteur ;
3° Avoir frauduleusement augmenté le passif du débiteur ;
4° Avoir tenu une comptabilité fictive ou fait disparaître des documents comptables de l’entreprise ou de la personne morale ou s’être abstenu de tenir toute comptabilité lorsque les textes applicables en font obligation ;
5° Avoir tenu une comptabilité manifestement incomplète ou irrégulière au regard des dispositions légales. »
La corruption
La corruption est une infraction, qui est définie comme le fait : « de solliciter ou d’agréer, sans droit, à tout moment, directement ou indirectement, des offres, des promesses, des dons, des présents ou des avantages quelconques pour elle-même ou pour autrui. »
Il existe deux types de corruption :
– la corruption passive : la personne qui accomplit ou n’accomplit pas un acte de sa fonction pour recevoir une contrepartie. Seront concernés par cette infraction la personne dépositaire de l’autorité publique, mais aussi investie d’un mandat électif public ou chargée d’une mission de service public.
– la corruption active : l’initiative est prise par le corrupteur, la personne qui octroie la contrepartie.
Il n’y a pas besoin de revêtir une qualité particulière, donc peuvent être concernés les dirigeants de société.
Le trafic d’influence
Le trafic d’influence est une infraction qui est définie comme le fait : « de solliciter ou d’agréer, sans droit, à tout moment, directement ou indirectement, des offres, des promesses, des dons, des présents ou des avantages quelconques pour elle-même ou pour autrui. »
Il existe deux types de trafic d’influence :
– le trafic d’influence passif : la personne use de son influence réelle ou supposée en vue d’obtenir une contrepartie. Seront concernés par cette infraction la personne dépositaire de l’autorité publique, mais aussi investie d’un mandat électif public ou chargée d’une mission de service public.
– le trafic d’influence actif : l’initiative est prise par la personne qui octroie la contrepartie.
Il n’y a pas besoin de revêtir une qualité particulière, donc peuvent être concernés les dirigeants de société.
Le faux
Le faux est une infraction qui est définie comme « toute altération frauduleuse de la vérité, de nature à causer un préjudice et accomplie par quelque moyen que ce soit, dans un écrit ou tout autre support d’expression de la pensée qui a pour objet ou qui peut avoir pour effet d’établir la preuve d’un droit ou d’un fait ayant des conséquences juridiques ».
Tout support peut faire l’objet d’un faux, qu’il s’agisse d’un document, d’une vidéo, d’une bande son, d’une photo.
Le support en question doit avoir une certaine valeur, il doit constituer un titre ou permettre de faire la preuve d’un droit.
Ainsi, à titre d’exemple, falsifier un CV n’est pas punissable sur le fondement de cet article faute pour le CV d’avoir une valeur probatoire en lui-même.
Enfin, la falsification peut porter sur le document lui-même comme une fausse signature, un abus de blanc-seing, une fabrication ex nihilo d’un document.
Dans cette hypothèse il importe peu que le contenu soit véridique.
Ainsi, reproduire un document officiel que l’on aurait perdu est constitutif de faux.
La falsification peut porter également sur le contenu, ce qui est le cas en présence de fausses déclarations.
Le travail dissimulé
’« Est réputé travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié le fait pour tout employeur :
– 1° Soit de se soustraire intentionnellement à l’accomplissement de (…) la déclaration préalable à l’embauche ;
– 2° Soit de se soustraire intentionnellement à (…) la délivrance d’un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d’une convention ou d’un accord collectif d’aménagement du temps de travail (…) ;
– 3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l’administration fiscale en vertu des dispositions légales
Pratique commerciale trompeuse
Le délit de pratique commerciale trompeuse est caractérisé par l’un des comportements suivants :
* Lorsqu’elle crée une confusion avec un autre bien ou service, une marque, un nom commercial, ou un autre signe distinctif d’un concurrent
* Lorsqu’elle repose sur des allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire et portant sur l’un ou plusieurs des éléments suivants
* Lorsque la personne pour le compte de laquelle elle est mise en œuvre n’est pas clairement identifiable
* Si elle omet, dissimule ou fournit de façon inintelligible, ambiguë ou à contretemps une information substantielle ou lorsqu’elle n’indique pas sa véritable intention commerciale dès lors que celle-ci ne ressort pas déjà du contexte
Toutes ces pratiques ont pour point commun de véhiculer des éléments susceptibles d’induire en erreur le consommateur moyen.
À titre d’exemple, faire croire à l’origine française d’un produit fabriqué à l’étranger ou l’indication de la mention « satisfait ou remboursé » alors que les conditions de vente soumettent cette possibilité à des conditions qui ne sont pas indiquées dans l’annonce relèvent du délit de pratique commerciale trompeuse.
La fraude
Cette infraction est prévue par le Code général des impôts qui la définit comme : « quiconque s’est frauduleusement soustrait ou a tenté de se soustraire frauduleusement à l’établissement ou au paiement total ou partiel des impôts visés dans la codification, soit qu’il ait volontairement omis de faire sa déclaration dans les délais prescrits, soit qu’il ait volontairement dissimulé une part des sommes sujettes à l’impôt, soit qu’il ait organisé son insolvabilité ou mis obstacle par d’autres manœuvres au recouvrement de l’impôt, soit en agissant de toute autre manière frauduleuse. »
Cet article énumère tous les procédés entrant dans le champ d’application de l’infraction. Il peut par exemple s’agir de comptes ouverts ou de contrats souscrits auprès d’organismes établis à l’étranger, ou encore d’une domiciliation fiscale fictive ou artificielle à l’étranger.
Le blanchiment
L’infraction est prévue au Code pénal, qui distingue deux types de blanchiment :
– « le fait de faciliter, par tout moyen, la justification mensongère de l’origine des biens ou des revenus de l’auteur d’un crime ou d’un délit ayant procuré à celui-ci un profit direct ou indirect.
– Constitue également un blanchiment le fait d’apporter un concours à une opération de placement, de dissimulation ou de conversion du produit direct ou indirect d’un crime ou d’un délit. »
La liste est longue .
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