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« Pharmacopée et médecine dite moderne au Bénin : cadre légal et institutionnel ». C’est le thème qui a réuni les praticiens du droit médical et de la santé samedi 13 juillet 2019 dans l’amphithéâtre Master Kinésithérapie de la faculté des sciences de la santé.
L’atelier organisé par l’Association béninoise de droit médical et de la santé vise à renforcer la capacité des participants surtout sur le cadre législatif et institutionnel.
Me Gabriel Ahouandogbo a exposé les différents textes législatifs concernant la médecine moderne au Bénin en abordant aussi quelques textes existants sur la médecine traditionnelle. Il a fait remarquer qu’ « On reproche à la médecine traditionnelle les problèmes de dosage, de conformité ..., mais avec la médecine moderne, elles ont un lieu commun qui est le traitement des maladies ». Il rappelle aussi les conditions d’exercice en clientèle privé et les textes y afférents. Il s’agit de trois conditions notamment, être titulaire d’un diplôme, être de nationalité béninoise, et l’obligation d’être inscrit au tableau d’un bord.
« Pour la pharmacie, c’est les mêmes conditions mais ici le législateur pense que la gestion d’un officine de pharmacie soit conditionnée par la présence d’un spécialiste ». Comme textes existants, Me Gabriel Ahouandogbo cite la loi N°97-020 du 17 juin 1997 fixant les conditions de l’exercice en clientèle privée des professions médicales et paramédicales, l’ordonnance N°73-14 du 08 février 1973 instituant le code de déontologie médicale. Plusieurs textes sont mis en exergue par le praticien de droit afin de montrer le cadre législatif qui encadre l’exercice de la médecine moderne au Bénin.
Le thème de l’atelier a été abordé de long en large par un autre spécialiste de la question.
Pour le professeur Roch A. Houngnihin, Anthropologue, Coordonnateur du Programme national de la médecine traditionnelle (2007-2019), « La médecine traditionnelle selon l’OMS, peut être définie comme « l’ensemble des connaissances et pratiques explicables ou non, pour diagnostiquer, prévenir ou éliminer un déséquilibre physique, mental ou social, en s‘appuyant exclusivement sur l’expérience vécue et l’observation transmise de génération en génération oralement ou par écrit ».
Il rappelle la cartographie des acteurs au Bénin où on note une gamme variée de professionnels. Entre autres, il souligne, les phytothérapeutes (plantes), les psychothérapeutes (« incantations »), les spiritualistes (rites et rituels sacrificiels), les chirokinésithérapie (fractures), les médico-droguistes (vendeurs d’ingrédients), et les phlébotomistes (techniques de saignée).
Le professeur citant l’OMS, indique qu’un guérisseur traditionnel est « une personne reconnue par la collectivité dans laquelle elle vit comme compétente pour dispenser des soins de santé grâce à l’emploi de substances végétales, animales ou minérales et d’autres méthodes basées sur le fondement socioculturel et religieux aussi bien que sur les connaissances, comportements et croyances liés au bien-être physique, mental, social ou spirituel ainsi qu’à l’étiologie des maladies et invalidités prévalant dans la collectivité ». L’anthropologue explique que le Bénin fait partie des pays où le recours à la médecine traditionnelle est évoluée. Il est selon les données de 2002, le deuxième pays après l’Ethiopie avec 80% de l’offre.
Prof Roch A. Houngnihin indique que contrairement à la médecine moderne, la médecine traditionnelle catégorise les maladies selon le registre des maladies naturelles et celui issue registre sorcellaire et de l’envoutement.
Il met en exergue les différents textes de lois entre autres, l’intégration des guérisseurs traditionnels dans les programmes nationaux de lutte contre les maladies prioritaires.
Aussi indique-t-il le décret 036 fixant les principes de déontologie et les conditions de l’exercice de la médecine traditionnelle au Bénin puis l’arrêté n°9969 portant réglementation de la publicité en matière de pharmacopée et de médecine traditionnelles au Bénin. Il cite aussi l’arrêté n°017 portant homologation des médicaments à base de plantes au Bénin.
Le Bénin n’a pas une législation spécifique relative à la médecine traditionnelle en dehors du décret n°262 portant interdiction de la publicité sur les professions médicales, les activités médicales, les médicaments et autres produits médicaux.
Pour le professeur les défis sont énormes. Il souligne le vide juridique dû à l’absence d’un cadre législatif. « On a longtemps observé une tolérance par rapport à la profession, d’où anarchie et abus de maints acteurs (charlatanisme, escroquerie) surtout en ville », explique-t-il. Aussi note-t-on, les difficultés de règlementation de certaines pratiques (surtout en zone rurale) puis les pesanteurs sociologiques (sorcellerie).
Cette rencontre reste une des activités de l’Association béninoise de droit médical et de la santé. Selon le magistrat Olushégun Tidjani Serpos, président de la commission formation, l’association a entre autres pour objectif de faire avancer la connaissance dans le domaine du droit médical. En tant que professionnels de droit et de la santé réunis au sein de l’Abdms, « nous organisons des formations ». Il précise qu’un certain nombre de formations ont été déjà faites notamment le cadre légal et institutionnel de l’exercice de la médecine et sur bien d’autres thématiques. Il explique que pour le compte du mois de Juillet-Août, un éventail de trois thématiques seront développés sur la médecine traditionnelle et la médecine dite moderne. Cette fois-ci c’est le cadre institutionnel et légal. Suivra la thématique sur la publicité dans le secteur et ceux qui violent les lois qu’est ce qui est prévue par le législateur comme sanction et qu’en est-il ? La dernière thématique prendra en compte la responsabilité civile et la responsabilité pénale du praticien de la médecine moderne d’un côté et de l’autre la médecine traditionnelle. Il précise qu’en tant que Béninois, il n’est pas bien de tourner dos à ce qui se fait avant l’avènement des occidentaux.
Pour Olushégun Tidjani Serpos « les techniques de nos parents existaient et n’ont jamais disparues. Il faut que ces techniques soient mieux encadrées pour que la santé des Béninoises et des Béninois ne soit pas livrée entre les mains des charlatans ». Aussi fait-il savoir « qu’il ne faudrait pas qu’en voulant encadrer on empêche ceux qui sont de détenteurs de connaissances de faire valoir ces connaissances pour le bien du plus grand nombre ».
G.A
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