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La Commission Parlementaire d’Information, d’Enquête et de Contrôle relative à la gestion des Fonds FADeC créée par décision N°P2013-014/AN/Pt du 16 juillet 2013 consécutive à la Résolution N°R.2013/AN/PT votée par l’Assemblée Nationale en sa séance plénière du mardi 25 juin 2013, pour atteindre les résultats escomptés, s’est subdivisée en cinq (5) équipes qui correspondent aux cinq (5) lots constitués à travers une partition de tout le territoire nationale.
L’équipe n°4 est intervenue dans le lot N°4 correspondant aux départements de l’Atacora et de la Donga, principalement dans les Communes suivantes : Bassila, Boukombé, Cobly, Copargo, Djougou, Kérou, Kouandé, Matéri, Natitingou, Ouaké, Ouassa- Pehunco, Tanguiéta, Toukountouna.
Cette équipe n°4 est ainsi composée :
- Honorable AKOFODJI Grégoire (Député)
- Honorable SEHOUETO Lazare (Député)
- FAGNON Stanislas (Personne ressource)
- IDRISSOU Alassane (Assistant parlementaire)
Sur le terrain, la mission a duré du 19 septembre au 03 décembre 2013.
Le temps passé dans chaque Commune visitée a été fonction du niveau de préparation de la mission (recherche et classement des dossiers, disponibilité des informations demandées et des fiches de collecte) par le personnel des communes contrôlées d’une part et la célérité des actions de vérification. Globalement, l’équipe a travaillé vingt et un (21) jours sur le terrain conformément au programme joint en annexe.
Les détails relatifs à chaque Commune visitée, sont conservés dans un classeur réservé à cet effet, par Commune. Un rapport spécifique concernant chaque Commune est également fait et joint en annexe.
Le présent rapport de l’équipe N°4 qui présente l’essentiel sur l’état des lieux, les constats et les observations concernant le lot N°4, s’articule autour des points suivants :
1. Synthèse des constats et des informations collectées
2. Analyses et commentaires
3. Recommandations
I. SYNTHESE DES CONSTATS ET INFORMATIONS COLLECTES
Les constats et les informations collectées peuvent se résumer ainsi qu’il suit :
1. Contrôle de la prévision des dépenses d’investissement au PAI et au budget
La Délégation a procédé à la vérification de l’existence d’un Plan Annuel d’Investissement (PAI) dans chaque Commune et à leur collecte. Elle s’est assurée de l’inscription des dépenses d’investissement au PAI et au budget. Elle s’est en outre assurée du respect des destinations des investissements prévus.
Il est apparu une incohérence entre les PDC et la mise en oeuvre des PAI. En effet, alors que dans les PDC il est affirmé la primauté de l’agriculture, il n’y a été contaté aucun investissement dans les départements de l’Atacora et de la Donga, a priori départements réputés agricoles. En général, l’investissement des fonds FADeC à travers des appuis dans le secteur productif, est mineur voire inexistant.
Par exemple la Commune de Boukombé aurait pu apporter un appui financier à l’association des femmes de la localité, transformatrice des produits agro-alimentaires, dans un partenariat public-privé.
2. Contrôle de l’éligibilité des dépenses au FADeC
Le contrôle a montré que le respect de l’éligibilité des dépenses au FADeC a progressé de 2008 à 2013, avec quelques transgressions.
3. Contrôle par sondage de la bonne gestion des marchés publics
Les dossiers ont été sélectionnés par sondage, en tenant compte soit du montant du marché soit de son objet. Les vérifications ont porté sur :
- l’éligibilité de la dépense au FADeC
- l’inscription de l’objet de la dépense au PAI (investissement) et au budget
- l’autorisation de la dépense par le Conseil Communal
- l’ouverture d’un dossier par opération
- le contenu des dossiers
- le dossier d’appel d’offres ;
- l’avis de lancement de l’Appel d’offres ;
- le PV d’ouverture et d’analyse et le Compte rendu à l’Autorité ;
- l’attribution du marché ;
- le contrat ;
o N° du contrat
o date d’exécution
o délai de livraison
o modalités de paiement
o signature des contractants
o pénalités de retard
o conditions de résiliation
o visas du Responsable de la Cellule Communale de Passation des Marchés et signature du Maire
o enregistrement aux impôts
- l’approbation de la tutelle
- la durée d’exécution des marchés
- l’enregistrement des marchés exécutés dans les registres
- ’enregistrement des dossiers dans le journal des engagements et les autres registres FADeC
- la liquidation des dossiers
existence d’une Commission Communale de réception
existence d’un contrat régulier (signé, approuvé, enregistré)
existence de la lettre de marché ou du Bon de commande
existence d’un BL/BR ou d’un PV de réception
- l’enregistrement des mandats de chaque dépense dans le registre FADeC mandatement ;
- l’absence de compte rendu à la CoNaFiL ;
- l’absence de comptabilité matière.
- les fonds FADeC fonctionnement sont confondus avec les frais de fonctionnement de la Mairie.
Grossomodo, les faiblesses observées se résument :
au non respect des procédures administratives et réglementaires ;
à une insuffisance de rigueur dans la tenue des dossiers ;
à un archivage approximatif ;
à une insuffisance de rangement des pièces administratives ;
à une utilisation abusive des fonds FADeC, dans bien des cas.
Les exemples ci-dessous constituent des illustrations.
Commune de Matéri
Sur l’ensemble des dossiers contrôlés par la Commission parlementaire, aucun n’était au complet. La Commission a, à titre de sondage particulier, laissé la liberté aux agents de lui présenter au moins un dossier qu’ils estiment être au complet conformément à la lettre administrative N° 2031-13/AN/SGA du 03 octobre 2013. Le résultat est resté le même à savoir le manque d’une, de deux, de trois voire plus de pièces justificatives.
Ceci a occasionné une perte énorme de temps à la Commission qui malgré tout, a tenu à s’assurer de l’effectivité de certaines réalisations. C’est au cours de cette visite, qu’en réponse à une question il est apparu que le dossier relatif à la réfection de la résidence du Maire ne figure pas au nombre ceux présentés à la Commission parlementaire, alors que ces travaux ont été financés par les fonds FADeC.
Commune de Boukoumbé
1er cas : Dans le dossier N° 5 intitulé « Réalisation du site web de la Commune de Boukombé » d’un coût total de 9 000 000 F, un seul mandat de 4 499 999 F y a été retrouvé alors que la dépense est entièrement liquidée.
2ème cas : Dans le dossier N° 6 intitulé « Réalisation du cyber café de la Commune de Boukombé » d’un coût total de 13 000 000 F, le montant engagé et indiqué sur la liste (13 000 000 F) n’est pas égal au montant adjugé qui est de 8 989 000 F. Cet état de chose jette de doute sur ce dossier.
3èmecas : Dans le dossier N°11 intitulé « Achat de matériels de l’hôpital de Boukombé » d’un coût total de 11 497 411 F, un seul mandat de six (6) millions de francs CFA représentant les frais de transport de l’Europe jusqu’à Cotonou, est joint à ce dossier. Le mandat représentant le transport de Cotonou à Boukombé n’y est pas joint. Ce dossier est flou et sa consistance reste à vérifier. En effet, l’intitulé du dossier [ACHAT] cache la réalité de l’opération qui est en réalité le financement du transport du matériel donné.
4èmecas : Le dossier N°16 intitulé « Achat de vélos pour les Chefs de village » d’un coût de 2 485 000 F ne contient que le mandat de paiement en date du 30 juillet 2009. La dépense est pourtant entièrement liquidée.
5èmecas :Pour les dossiers N°25 intitulé « Construction d’un module de trois (3) salles de classes à l’EPP Dipoli » d’un coût total de 14 791 445 F et N°26 intitulé « Construction d’un module de trois (3) salles de classes à l’EPP Dipokor Fontri » d’un coût total de 16 497 628 F, il a été constaté une différence de 1 706 183 F pour la même consistance de travaux dans la même Commune de Boukombé, sans que l’on ne parvienne à donner une justification à cet état de choses.
6ème cas : Dans le dossier N°40 intitulé « Construction d’un module de trois (3) salles de classes + bureau magasin, à l’EPP Tchapéta » d’un coût total de 19 164 720 F, il a été constaté que :
- le délai contractuel est dépassé sans que les clauses de pénalité ne soient appliquées ;
- la réception provisoire est en cours alors qu’il est indiqué sur le répertoire que les travaux sont achevés.
Commune de Natitingou
1er cas : La Commission parlementaire s’est interrogée sur la sincérité des prix relatifs au dossier N°8 intitulé « Fourniture d’armoires métalliques importées à deux (2) battants coulissants » d’un montant de 9 345 600 F et à celui intitulé « N°9 : Fourniture et installation d’appareils climatiseurs dans les bureaux de la Mairie » d’un montant de 7 917 800 F.
Selon la Commission parlementaire les prix pourraient être sujets à caution.
2ème cas : Concernant le dossier N° 6 intitulé « Grattage et reprofilage des voies de la ville de Natitingou, pendant la saison des pluies » d’un montant de 9 925 000 F, La Commission parlementaire a constaté que :
- Le niveau de formation des contrôleurs des travaux du génie civil est peu satisfaisant ;
- Le taux de rémunération des contrôleurs des travaux du génie civil varie de 3% à 7% dans une même Commune.
3èmecas : L’une des spécifications techniques du dossier N°1 de l’année 2012, intitulé « Fourniture d’un camion berne avec grue pour la collecte des ordures » d’un montant de 26 000 000 F, indique que l’âge du camion doit être compris entre 1995 et 2005. Cette absence de précision sur l’âge du véhicule à acquérir pourrait donner lieu à plusieurs autres commentaires et laisse croire à un choix orienté d’achat un camion d’occasion avec des fonds publics avec des imprécisions qui laissent penser à des connivences au détriment de la Commune.
Commune de Ouaké
1er cas : Dans le dossier N°2 intitulé « Réfection du Centre des Jeunes » d’un montant de 22 340 036 F, la mise en concurrence est imparfaite parce que deux (2) des trois dossiers présumés concurrents, sont irrecevables et donc tout le processus s’est déroulé avec une seule entreprise.
2ème cas : Le dossier N°5 intitulé « Sélection d’un bureau d’études » d’un montant de 7 508 750 F, constitue une corbeille de travaux hétéroclites sans lien entre eux avec des sources de financement différentes, principalement des FADeC non affectés pour financer en partie les FADeC affectés (pour payer les frais du contrôle des travaux financés par les FADeC affectés).
3èmecas : La réfection de la résidence du Maire, objet du dossier N°4 d’un montant de 15 371 118 F, non seulement est inéligible mais ne contient que le contrat, comme seule pièce justificative de la dépense.
4ème cas : Observations d’ordre administratif sur les registres
• le registre des fonds FADeC est côté et paraphé par le Maire le 28 septembre 2012. Paradoxalement, les données des années 2008, 2009, 2010, 2011 et 2012 y figurent sauf celles de l’année 2013 ;
• après la signature du registre le 30 août 2013 par les membres de la Commission de vérification FADeC, aucun enregistrement n’est constaté parce qu’un cahier a été créé en remplacement de ce registre ;
• dans le « Journal des matières et objets » seule la colonne « entrée » est remplie et ici également, après l’inspection du 30 août 2013, aucun enregistrement n’est constaté.
Commune de Djougou
Un PV de réception contenu dans le dossier N°4 relatif à la réalisation d’un téléfilm et son avenant juge les travaux faits à 100%. Cependant ce téléfilm n’a pas été présenté à la Commission parlementaire par les agents parce se trouvant avec le Maire. Toutefois, ils expliquent verbalement que la version arabe n’aurait pas été finalisée.
Plus tard, le Maire explique que ce téléfilm est prévu pour être réalisé en trois langues à savoir en français, en allemand et en arabe. Il confirme que la version arabe n’a pas été réalisée en raison d’incompréhension avec le prestataire de services. Donc, les travaux ne sont pas faits à 100% contrairement à ce qui est écrit sur le PV.
4. Contrôle de l’existence et de la bonne tenue des différents registres de gestion du FADeC
Dans les mairies, les différents registres de gestion du FADeC à savoir le registre des engagements et le registre des mandats ont été réclamés et examinés par la Délégation Parlementaire pour s’assurer de l’existence, de la bonne tenue desdits registres et de leur conformité à la présentation exigées par le manuel de procédures de gestion du FADeC.
La Délégation a noté que même si les registres existent, ils n’ont pas partout été mis en conformité avec les présentations décrites dans le manuel de procédures FADeC et qu’ils sont, par endroit mal tenus en raison, soit d’une insuffisance de compétence de leurs utilisateurs, soit par négligence mais dans tous les cas, par insuffisance de rigueur de la part du Maire qui est le premier responsable de l’administration.
Les registres d’immobilisations existent en général et doivent faire l’objet d’une mise en conformité avec les présentations du manuel de procédures.
5. Contrôle des registres au niveau des Recettes – Perceptions
Au niveau des Recettes – Perceptions, très peu de Receveurs– Percepteurs étaient présents pendant la tournée de la Délégation. La plupart d’entre eux étaient soit en formation en dehors de leurs lieux de travail, soit en mission.
Dans les cas où cela a été possible, la Délégation a procédé à une vérification de l’existence du registre de paiement. Sauf le cas de Kouandé où l’actuel Receveur a institué l’établissement des états de rapprochement bancaire, cette pratique n’est pas communément mise en œuvre par les Receveurs – Percepteurs.
Les relevés bancaires ne sont pas disponibles partout.
6. Contrôle du respect des procédures de dépenses et de la traçabilité des informations financières dans les différents registres de gestion du FADeC
La Délégation a procédé à la vérification du respect des procédures de dépenses, notamment le respect des différentes phases des dépenses publiques, à savoir : engagement, liquidation, mandatement et paiement.
Par sondage, quelques opérations de dépenses sélectionnées en fonction, soit de leurs montants soit de la nature de la dépense, ont fait l’objet d’une vérification de conformité par rapport aux procédures, d’exactitude des montants décaissés, de conformité des montants décaissés par rapport aux montants prévus, de traçabilité dans les différents registres de gestion FADeC à la Mairie et à la Recette-Perception .
La réalité des mandats émis pour les décaissements, leurs traces dans les registres de gestion FADeC à la Mairie et la Recette-Perception ont fait l’objet de vérification.
A la Recette-Perception, quand le contrôle a été possible, la Délégation a constaté que les mandats ont été transmis à la Chambre des Comptes pour exploitation. Des copies n’étaient pas disponibles.
7. Examen des délais de mise en place des fonds
L’annonce des dotations budgétaires allouées aux Communes est consécutive à l’examen et à l’adoption du budget par l’Assemblée Nationale.
Conséquence de cette situation, les Communes élaborent leurs budgets sur des bases non pertinentes.
Ainsi, les premiers fonds de l’année en cours sont mis en place à la fin du premier trimestre et la dernière tranche chevauche l’année suivante.
8- Examen de la qualification des gestionnaires du FADeC
Au regard des insuffisances relevées, de la qualité de l’organisation du travail au niveau des Communes visitées, la Délégation Parlementaire s’est appesanti sur la qualification de certains intervenants dans la gestion du FADeC au niveau des Communes. Les plus beaux textes ne valent que ce que valent les personnes chargées de leur mise en œuvre.
Au regard des CV dépouillés, l’on pourrait dire sans grand risque de se tromper que, dans bien des cas :
- le profil des agents administratifs n’est pas en adéquation avec les postes occupés ;
- le niveau de formation des contrôleurs des travaux du génie civil n’est souvent pas satisfaisant.
Le tableau récapitulatif des constats au niveau des Communes de la zone N° 4 figure en annexe du présent rapport.
9- Contrôle sur site de la réalité des infrastructures financées sur le FADeC
La délégation a procédé à quelques visites de sites pour s’assurer de la réalité de certaines infrastructures par sondage. La Commission a pu constater sans juger de la valeur que dans l’ensemble, le lieu de localisation des infrastructures physiques visitées est en concordance avec les indications théoriques.
10. Echanges sur les conditions d’amélioration de la gestion du FADeC : Collecte des fiches de collecte d’informations adressées aux Maires
A la fin des contrôles, des échanges ont eu lieu, soit avec le Secrétaire Général de la Mairie, soit avec le Chef Service Technique, soit avec le Chef Service Développement Local ou avec l’ensemble de ces personnes sur les autres aspects de la mission notamment les conditions d’amélioration de la gestion du FADeC et la gouvernance locale. A cette étape, les fiches de collecte d’information et les autres supports transmis aux Maires ont été collectés et commentés. Certaines Mairies n’avaient pas rempli les fiches ou n’avaient pas finalisé le traitement des fiches. Il a été souvent convenu que les fiches non remplies et autres documents demandés par la Délégation et non disponibles au passage de la Commission parlementaire devraient lui être transmis plus tard. L’ensemble des Communes se sont exécutées par rapport à cet engagement.
II. ANALYSES ET COMMENTAIRES
Les constats faits et les informations collectées, amènent à penser entre autres, que :
1°- l’insuffisance de rigueur au niveau des Communes, proviendrait de l’insuffisance de formation et de l’inadéquation du profil des agents avec les postes occupés. Toutefois, il est à noter que les insuffisances constatées qui ont obligé la Commission à visiter deux fois certaines Communes notamment celles de BOUKOMBE, DJOUGOU et COPARGO, ont été corrigées suivant les indications de la Commission parlementaire. Il s’ensuit que des insuffisances pourraient se retrouver au niveau des responsables politiques, en l’occurrence les Maires qui sont ceux qui donnent les orientations et instructions à exécuter par les agents techniques. Le résultat pourrait être le laxisme difficilement dissimulable. Cette insuffisance de rigueur pourrait également résulter de la mentalité béninoise assez répandue selon laquelle « c’est l’argent qu’on cherche, on ne cherche pas le travail ».
2°- la concurrence biaisée et l’absence d’échange de correspondances entre les Maires et les entrepreneurs, pourraient laisser penser entre autres, à une complicité de détournements ou de népotisme entre les deux parties.
3° Le recrutement (souvent par arrêté communal) d’agents dont le profil n’est pas en adéquation avec les services à prester par ces agents, pourrait être assimilé a priori à du népotisme, à du favoritisme. Mais, la non ouverture de chaque région sur les autres régions, induite et entretenue par l’existence de « partis uniques locaux » au Bénin, pourrait contribuer à cette pratique nuisible au développement des Communes.
4°-la contribution des fonds FADeC à la lutte pour la réduction de la pauvreté pourrait être mitigée parce que, si par des chiffres globaux, il semble possible de faire des déductions par rapport à la pauvreté matérielle, cela ne semble pas être possible pour la pauvreté immatérielle .
- En effet :
- la presque inexistence d’investissement des fonds FADeC dans le secteur productif au profit du secteur social (non productif de richesses mais indispensable) contribue à perpétuer la politique de la main tendue, source de pauvreté matérielle ;
- la pauvreté immatérielle est la mère de la pauvreté matérielle. Les pratiques conduisant à placer des agents à des postes qui ne sont pas en adéquation avec leur profil privent les Communes de cadres compétents susceptibles de réfléchir et d’initier des projets de développement.
5°- Les réformes de l’administration territoriale visent la promotion d’une meilleure gouvernance des affaires publiques à la base par les populations contrairement à la « politique traditionnelle » qui confie aux seules autorités de l’Etat central, la responsabilité de la gestion des affaires publiques. Malheureusement, ces réformes semblent peiner à se réaliser pour des raisons diverses, à tous les niveaux ci-après :
Au niveau du Gouvernement :
1°- A la création du FADeC, le transfert des fonds sans orientations et indications ont occasionné les dépenses non éligibles effectuées et dument constatées par la Commission. Ce transfert des fonds en dehors du manuel de procédure donne l’impression qu’il s’agit de décisions prises au sommet de l’administration centrale sans la participation des élus locaux chargés de mettre en application ces décisions.
2°- Le Maire de Tanguiéta semble avoir été "contraint" de signer le contrat relatif à l’achèvement de la construction du centre de santé de TORA, à l’achèvement de la construction de la clôture de l’Hôpital de zone de Tanguiéta, deux dossiers, sans Dossier d’Appel d’Offres et sans Procès Verbal. Il semblerait que le Ministère de la Santé ayant sélectionné l’Entreprise par avance, celle-ci avait déjà commencé l’exécution des travaux avant que le transfert officiel ne s’effectue à la Mairie.
Au niveau des Communes :
1°- A la création du FADeC, les dépenses non éligibles effectuées concernent dans la majorité des cas, la construction, la réfection ou l’équipement du bureau et/ou du domicile du Maire, ou l’achat ou la réparation du véhicule de commandement du Maire. Si une consultation démocratique sur les réelles priorités des populations bénéficiaires était organisée pour recueillir leur avis sur "construire, réfectionner ou équiper le bureau et/ou le domicile du Maire" et "construire le bureau du Chef de leur quartier ou de leur village", la priorité pourrait être le bureau du Chef de quartier ou de village, symbole de l’Etat béninois à la base.
2°- Si la création du FADeC est légale et légitime, les pratiques de sa mise en œuvre, semblent avoir contribué à :
• inciter les collectivités locales à ne compter que sur les fonds extérieurs (les frais de fonctionnement de certaines Communes sont confondus avec les fonds FADeC-fonctionnement) ;
• inhiber les initiatives de valorisation des potentialités à la base et d’imagination pour créer des richesses à partir de ces potentialités locales ;
• inciter les Maires à ne pas instaurer la bonne gouvernance locale.
Les goulots d’étranglement dans la gestion des fonds FADeC peuvent se rechercher entre autres au niveau des lois sur la décentralisation ; mais très probablement aussi au niveau des lois portant charte des partis politiques et statut de l’opposition. En effet, l’existence de « partis uniques locaux » en lieu et place de partis politiques d’envergure nationale constituerait un problème majeur dont il faut tenir compte.
III. RECOMMANDATIONS
III.1. Recommandations à l’endroit des Maires
* éviter au maximum l’oralité et privilégier la rédaction administrative dans la gestion des affaires publiques, en vue d’assurer la continuité de l’administration ;
* être rigoureux dans la conduite des affaires publiques ;
* systématiser la publicité sur les appels d’offres ;
* recruter des contrôleurs de travaux ayant un niveau de formation et une expérience acceptables ;
* retenir un taux fixe d’honoraire de contrôle des travaux ou à défaut justifier le taux retenu selon le cas par l’importance de ces travaux et/ou le risque encouru ;
* faire constater le rappel à l’ordre des entrepreneurs par des correspondances administratives en cas de non respect de leurs obligations contractuelles ;
* appliquer les clauses de pénalité contenues dans le contrat en cas de non respect du délai contractuel ;
* prendre des précautions avant de signer des contrats ambigus venant des ministères sectoriels ou de toute autre structure ;
* éviter de financer des projets FADeC affectés par d’autres sources tels que les FADeC non affectés ou les fonds propres de la Commune ;
*activer l’intercommunalité et la rendre effective, efficace et réciproquement bénéfique pour chaque Commune.
VII.2. Recommandations à l’endroit de l’ANCB
*organiser des formations de mise à niveau et de recyclage au profit des agents des collectivités locales selon les besoins ;
*organiser la formation sur le manuel de procédure du FADeC au profit de toutes les personnes impliquées dans sa gestion ;
*Organiser des formations périodiques au profit des Maires sur l’utilité des procédures administratives et sur le rôle des Secrétaires généraux de Mairie qui se trouvent être la mémoire et le bras des Communes et qui garantissent la continuité de l’administration ;
*activer l’intercommunalité et la rendre effective, efficace et réciproquement bénéfique pour chaque Commune.
VII.3. Recommandations à l’endroit du Gouvernement
o Valoriser la fonction d’agent de collectivité locale pour sortir le personnel administratif des Mairies de la précarité et pour inciter les cadres de qualification appropriée à travailler à des postes convenables ;
o organiser des formations périodiques au profit des Maires sur l’utilité des procédures administratives et sur le rôle des Secrétaires généraux de Mairie qui se trouvent être la mémoire et le bras des Communes et qui garantissent la continuité de l’administration ;
o encourager la mise en place dans toutes les Mairies, de procédures administratives, comptables et financières pour sécuriser les actifs et favoriser les contrôles ;
o penser à d’autres critères d’allocation des indemnités des élus communaux pour éviter des prévisions irréalistes. Le niveau des fonds propres investis dans la réalisation des projets et programmes de développement de la Commune, pourrait être l’un de ces critères ;
o permettre que chaque collectivité locale élabore son Programme de Développement Communal (PDC) en comptant d’abord sur la mobilisation de ses ressources humaines intérieures (et non sur un cabinet technique) pour créer des richesses nécessaires à la réalisation à un niveau adéquat de ce PDC. A cet effet, un canevas pourrait être proposé à toutes les Communes ;
o harmoniser la tenue des registres et autres documents de gestion à toutes les Communes en leur proposant des formulaires types ;
o transférer progressivement toutes les compétences et ressources aux Communes ;
o éviter d’ « imposer » les prestataires de services aux Communes ;
o notifier aux Communes les montants des fonds à elles alloués sur la base du détail des évaluations correspondantes.
VII.4. Recommandations à l’endroit de l’Assemblée Nationale.
R1 : organiser un régime réellement pluraliste qui garantit l’activité à un nombre raisonnable de partis politiques, en créant de réelles conditions de brassage des citoyens des différentes régions et ethnies du Bénin, l’éradication des « partis politiques uniques locaux ». Pour ce faire :
• Amender la loi N° 2001-21 du 24 juillet 2001 portant Charte des partis politiques au Bénin ;
• Amender la loi n° 2001-36 du 14 octobre 2002 portant statut de l’opposition.
R2 : créer des Commissions Parlementaires d’Information, d’Enquête et de Contrôle, périodiques relatives à la bonne gouvernance dans les Communes.
CONCLUSION
Le travail de la Commission a contribué à la prise de conscience par les élus locaux des insuffisances au niveau de leur administration. Ces insuffisances sont essentiellement de deux ordres : le volet administratif et le volet politique.
Au niveau administratif, les procédures ne sont généralement pas suivies soit par manque de qualification soit par insuffisance de rigueur.
Au plan politique, les efforts devraient tendre vers l’émergence des élus locaux politiquement formés (au sein des partis politiques fonctionnels) pour impulser le développement de leur Commune.
Pour promouvoir la participation des populations à la prise de décisions relatives aux projets et programmes de développement de leur localité, il serait souhaitable de mettre en œuvre la « pédagogie scolaire » selon laquelle les apprenants cherchent d’abord eux-mêmes la solution à un exercice avant que l’enseignant ne leur vienne en aide.
Somme toute, la bonne gouvernance est perçue comme la recherche de modes d’organisation favorisant non seulement la participation des populations mais également une interaction et une répartition des rôles entre les institutions de l’Etat, la société civile et l’économie privée sur la base des principes de la participation, la transparence, la non discrimination, l’efficacité et la fiabilité dans les affaires publiques, sous la houlette des hommes politiques. Par conséquent, le premier défi à relever par l’Assemblée Nationale est de fixer des critères [tout critère étant discriminatoire par ailleurs] de manière que le Droit positif favorise l’émergence d’une classe politique de qualité, fruit de l’existence de véritables partis politiques d’envergure nationale en lieu et place des actuels « partis politiques uniques locaux de fait ».
La voie du développement du Bénin pourrait passer très probablement par l’émergence de cette classe politique qualitativement meilleure parce que « la démocratie et la bonne gouvernance politique sont une condition préalable à la gouvernance économique, socio-économique et d’entreprise réussies.
Lire l’intégralité du rapport d’enquête dans le document ci-joint
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