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Henry Kissinger, qui a fui l’Allemagne nazie avec sa famille lorsqu’il était adolescent et a œuvré au service de deux présidents américains en qualité de secrétaire d’État, est décédé le 29 novembre. Il était âgé de 100 ans.
Figure imposante et architecte de la politique étrangère des États-Unis de la fin du XXe siècle, Kissinger forçait l’admiration par son intelligence et sa ténacité dans les négociations. Sa diplomatie a mis fin à la guerre du Vietnam et amélioré les relations des États-Unis avec leurs deux principaux antagonistes de la guerre froide, la Chine et l’Union soviétique.
Pour autant, son pragmatisme sans état d’âme ne lui valait pas que des admirateurs. Sa façon d’aborder la politique, baptisée realpolitik, était motivée par la conviction que la politique étrangère devait être guidée par l’intérêt national plutôt que par l’idéologie.
Des débuts modestes
Il a 15 ans, en 1938, lorsque ses parents quittent leur Allemagne natale pour émigrer aux États-Unis avec leurs enfants afin d’échapper à la persécution des Juifs par les nazis. La famille s’installe à New York, où le jeune Henry (qui s’appelait à l’origine Heinz) travaille dans une usine tout en suivant un enseignement secondaire le soir.
Il s’inscrit au City College de New York dans l’espoir de devenir comptable, mais à 19 ans, il est appelé sous les drapeaux dans l’armée américaine au moment où les États-Unis entrent dans la Seconde Guerre mondiale. Il se présente à l’entraînement de base en février 1943 et acquiert la nationalité américaine quatre mois plus tard, à l’âge de 20 ans.
Pendant la guerre, ses officiers supérieurs, impressionnés par son intelligence et sa maîtrise de l’allemand, le dirigent vers la section du renseignement militaire de la 84e division d’infanterie de l’armée, où il assume des fonctions dangereuses pendant la bataille des Ardennes.
Après la guerre, Kissinger s’inscrit au Harvard College, dont il sort titulaire d’une licence en sciences politiques en 1950, avant d’enchaîner, à l’université Harvard, une maîtrise en 1952 et un doctorat en 1954.
Il intègre le corps enseignant de Harvard et rédige un ouvrage sur les efforts déployés par le diplomate autrichien Klemens von Metternich pour rétablir un ordre international légitime en Europe après les guerres napoléoniennes de 1803-1815. Metternich influencera les idées de Kissinger des années plus tard, renforçant sa conviction que même un ordre mondial imparfait est préférable à la révolution ou au chaos.
Sur la scène mondiale
Le président Richard Nixon nomme Kissinger conseiller à la sécurité nationale en 1969. Kissinger prépare le terrain pour la visite de Nixon en Chine en 1972, laquelle contribuera à la normalisation des relations des États-Unis avec ce pays.
En tant que conseiller à la sécurité nationale, Kissinger s’est attaché à sortir l’Amérique de l’impopulaire et coûteuse guerre du Vietnam. Poursuivant une « paix dans l’honneur », il orchestre des initiatives diplomatiques pendant que les États-Unis maintiennent la pression sur les Nord-Vietnamiens en multipliant les raids.
Une stratégie qui connaît un succès en demi-teinte parce qu’elle prolonge le conflit de quatre ans, au cours desquels des milliers de soldats américains et vietnamiens sont tués. Kissinger et son partenaire de négociation nord-vietnamien, Le Duc Tho, se verront attribuer conjointement le prix Nobel de la paix en 1973, mais ce dernier refuse la récompense.
Kissinger sera secrétaire d’État (1973-1977) sous Nixon et le président Gerald Ford. Il joue un rôle déterminant dans le processus de détente du début des années 1970 entre les États-Unis et l’Union soviétique. En 1972, il négocie le traité sur la limitation des armes stratégiques (SALT I) et le traité sur les missiles antibalistiques, apaisant ainsi les tensions entre les deux superpuissances de la guerre froide.
Une influence continue
Lorsqu’il quitte ses fonctions, Kissinger se tourne vers l’enseignement, donne des conférences et écrit des livres, notamment ses mémoires (The White House Years) qui lui valent le National Book Award. Il continue d’apporter ses conseils aux présidents américains.
Avec l’ancien secrétaire à la défense William Perry, l’ancien sénateur Sam Nunn et l’ancien secrétaire d’État George Shultz, Kissinger presse les gouvernements d’adhérer à la vision d’un monde sans armes nucléaires.
Malgré son air sérieux, Kissinger savait faire rire. « Il ne peut pas y avoir de crise la semaine prochaine. Mon emploi du temps est déjà plein », a-t-il un jour plaisanté.
Henry Kissinger laisse dans le deuil son épouse, la philanthrope Nancy Maginnes Kissinger, qu’il a épousée en 1974, ses enfants, Elizabeth et David (de sa première femme, Ann Fleischer, à laquelle il a été marié de 1949 à 1964), et plusieurs petits-enfants.
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