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La communauté internationale célèbre le 6 février de chaque année, la journée mondiale de lutte contre les mutilations génitales féminines. Au Bénin, même si le phénomène est en régression, des enquêtes ont révélé que l’excision se pratique dans plus de trois grandes régions du Bénin, à savoir, le Nord, les Collines et le Plateau, selon Victorine Odoulami, présidente de l’antenne béninoise de l’Ong Comité interafricain sur les pratiques traditionnelles affectant la santé des femmes et des enfants (Ci-Af/Bénin).
Sous le slogan « Non à l’excision au Bénin », le ministre de l’enseignement secondaire a lancé un message à l’endroit des populations ce lundi 06 février 2017 pour la lutte contre les mutilations. Lucien Kokou a assurant l’intérim de sa collègue en charge des affaires sociales invite les victimes de cette pratique à dénoncer et en témoigner pour sauver des vies.
L’Oms, l’Unicef et le Fnuap ont publié conjointement en avril 1997, une déclaration définissant les mutilations génitales féminines comme « toutes les interventions aboutissant à une ablation totale ou partielle des organes génitaux externes de la femme… ».
Selon Sylvie de Chacus, Docteur en psychologie et sociologie, les mutilations génitales féminines communément appelées excision désignent l’ablation totale ou partielle des organes génitaux féminins extérieurs souvent par des méthodes archaïques. C’est des pratiques qui se font généralement sur des jeunes filles à partir de l’âge de 5 ans.
Au Bénin, bon nombre de filles ont été victimes de cette pratique. Imorou Sina, originaire d’un village du nord, a été excisée à l’âge de 6 ans. « Les gens étaient en train d’exciser des filles, et la musique qui accompagne la cérémonie était attirante. Donc, on est allé voir, parmi nous, il en a qui était déjà excisée, mais moi non. Quand elle a fini avec les cinq groupes, elle dit, mais celles qui sont debout là, est-ce qu’elles sont déjà excisées. Les autres ont répondu par l’affirmatif, et m’ont dénoncée que je ne l’ai pas encore faite. Et la dame qui excisait a autorisé qu’on m’amène vers elle. C’est de cette façon que j’ai été excisée », a exposé Imorou Sina qui intervient aujourd’hui aux côtés de l’Ong Ci-Af Bénin pour la lutte contre ce phénomène.
Selon Victorine Odoulami, présidente de l’Ong Ci-Af Bénin, l’excision se pratique encore en grande partie dans le septentrion.
« La grande partie où se fait encore, l’excision, c’est au nord. Nous avons quelques poches dans les Collines, et nous en avons aussi dans le plateau. A Cotonou, on retrouve des gens qui le font en cachette », a-t-elle révélé.
Les conséquences de l’ablation du clitoris sont multiples. Elle est à la source des hémorragies, de septicémie, ou des infections. Des complications peuvent s’avérer fatale pour celles qui en sont victimes. Les séquelles ne sont pas seulement physiques, mais aussi psychologiques, selon le Docteur Sylvie de Chacus.
« On note chez ces filles, la perte de confiance en famille, en la mère, et ça va jusqu’à la perte de confiance en soi-même. La mémoire de la douleur demeure en l’individu, ce qui peut entraîner des formes de phobie, de telle sorte que, la jeune fille, devenue, femme, ne pourra pas supporter les rapports sexuels », explique Sylvie de Chacus.
Les mutilations génitales féminines sont condamnées par les Nations-Unies en 1997. Au Bénin, cette pratique a été interdite en 2003.
Des études réalisées à l’échelle nationale ont montré que le phénomène a reculé un peu depuis une dizaine d’années. Mais il persiste dans certaines régions du pays.
La quatrième édition de l’enquête démographique et de santé a montré que la proportion des femmes excisées au Bénin a diminué depuis 2006, passant de 13% à 7% en 2012, avec de grandes disparités enregistrées entre les départements. Pour le ministre Luicen Kokou, les départements les plus touchés sont l’Atacora, la Donga, le Plateau avec une forte prévalence dans le Borgou et l’Alibori où l’on enregistre respectivement 41% et 26%.
Selon Claire Houngan Ayémona, ancien ministre de la famille et présidente de la Fondation Regard d’amour, des sanctions sont prévues contre ceux qui pratiquent l’excision sur les filles.
« Toute personne qui pratique les mutilations génitales féminines au Bénin peut être condamnée pour une peine de 03 mois à 03 ans ajoutée à une peine d’amende. S’il y a décès de la victime, la loi fait de l’infraction un crime passible de peine de 5 ans à 20 ans de travaux forcés avec une amende pouvant aller jusqu’à 6 millions de francs CFA.
Malgré l’existence du cadre juridique et en dépit des multiples campagnes de sensibilisation, la pratique de l’excision, selon le ministre Lucien Kokou, persiste. Son signal ce 06 février 2017 trouve pleinement sa raison d’être.
« Disons non, aux violences faites aux femmes et aux filles, non à la mutilation génitale féminine, non à la complicité coupable de la population », a martelé Lucien Kokou, ministre de l’enseignement secondaire.
Boniface CAKPO
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