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(Par Roger Gbégnonvi)
Le Bénin se souvient du cri échappé en pleine session parlementaire : ‘‘Tout le monde a reçu de l’argent, moi aussi !’’ De l’argent pour le vote d’une loi présentée par l’Exécutif. Comme si jamais n’avait existé l’article 91 de la Constitution : ‘‘Les députés perçoivent des indemnités parlementaires qui sont fixées par la loi.’’ Mais député sans projet politique ni ambition sociale, et ayant acheté les électeurs, on veut se faire rembourser par le biais de tout ‘‘service rendu’’ à l’Exécutif, quitte à obliger son chef à puiser pour vous dans les caisses de l’Etat et dans celles de l’aide internationale destinée à soulager le peuple souffrant. Us et coutumes d’un parlement réputé ‘‘à géométrie variable’’, sans majorité ni opposition, mais avec 83 sébiles au poing. Sans scrupule. L’auto mise en vente du député béninois est documentée par François Awoudo dans son ouvrage ‘‘Le mal transhumant’’ paru en 2004. Depuis lors, rien n’a changé. Et quand on a entendu en 2016 l’aveu ci-dessus, ‘‘tout le monde…moi aussi’’, on se demande comment on a pu présenter comme positif le modèle de démocratie incluant ce parlement-là, mauvais rêve qu’on lit dans les romans de Kafka.
A partir du 29 avril 2019, nos 83 députés devront nettoyer les écuries d’Augias. L’article 105 de la Constitution stipule : ‘‘L’initiative des lois appartient concurremment au Président de la République et aux membres de l’Assemblée Nationale.’’ Il leur revient donc d’initier la loi punissant de perte d’immunité parlementaire tout député enclin à se chosifier dans et pour l’exercice de ses fonctions. S’étant ainsi humanisés en s’arrachant à l’univers des ustensiles de cuisine, nos députés ne pourront plus, tels de grands égoïstes parvenus, pavoiser et bâfrer en s’offrant en spectacle le mal-vivre de ‘‘la Nation toute entière’’ par eux représentée au terme de l’article 80 de la Constitution. Ils appliqueront avec rigueur l’article 79 : ‘‘Il exerce le pouvoir législatif et contrôle l’action du Gouvernement’’. Exerçant le pouvoir législatif avec rigueur et voyant la misère grandir autour d’eux, ils prendront l’initiative de toute loi pouvant mettre en orbite de développement le peuple béninois.
Par exemple, la loi faisant de l’écriture et de la lecture de la langue maternelle le programme unique de l’enfant pendant la première année de sa scolarisation. Tout est prêt pour la mise en route. Seule fait défaut la volonté politique. Et ce n’est pas une lubie de quelques ‘‘gens rassasiés’’ comme on se plaît à insulter ceux dont la devise de vie n’est pas le profit immédiat et abondant. La loi pour la mise en route de ce programme s’impose pour deux raisons. 1- L’écriture est l’autre nécessaire nature de l’homme, l’outil merveilleux qu’il s’est donné pour préserver et faire voyager sa pensée, tout en s’ouvrant, à partir d’elle, les portes de tout monde et de toute science dans le temps présent et dans les temps passés. 2- L’UNESCO est formelle : toute ouverture à tout monde et à toute science se fait à partir de la langue maternelle écrite et lue dès la petite enfance. C’est la clé, le ‘‘Sésame, ouvre-toi’’.
Faute de cette clé magique, tout lettré béninois n’est qu’un simple répétiteur, parfois brillant, mais pas plus performant qu’un bon perroquet. Avec l’écriture, nous appellerons au jour nos gémies, porteurs de savoirs nouveaux et novateurs. Au sud du Sahara, nous nous complaisons dans la parole, don de la nature, et oublions que le don prodigieux fait par l’homme à la nature, c’est l’écriture. L’enfant Mozart, réputé ‘‘plaisanterie des dieux’’, est en vérité la résultante d’une longue tradition de mélodies écrites, la somme d’une longue histoire d’écriture musicale, dont la convergence sur lui l’a établi, par le travail précoce et assidu, lieu de prédilection pour les Muses. A partir du 29 avril 2019, nos députés entreront en rupture avec le passé pour ouvrir un parlement nouveau au service du pays et du peuple. Bon vent à nos députés de la 8ème Législature pour faire rayonner l’Afrique à partir du Bénin.