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Les subventions octroyées aux producteurs américains de coton constituent une grosse épine dans le commerce de l’or blanc. Des producteurs africains sont de plus affectés et des stratégies pour y remédier étaient au cœur des discussions lors de la conférence plénière des ministres du C-4 au cours de la sixième Journée mondiale du coton qui a eu lieu le 07 octobre 2024 à Cotonou. Jocelyn Nénéhidini, Business Consultant spécialiste des politiques cotonnières en parle au micro de Pamela Koumba de la radio sud-africaine Channel Africa…
Imaginez. Lorsqu’un produit doit coûter 100 francs sur le marché et que des pays donnent jusqu’à 200 francs pour le produire, c’est clair que ceux-là qui n’ont pas ces niveaux de participation en terme de subvention à leurs producteurs vont être perdants au change puisqu’à la fin, il y aura énormément de coton sur le marché, simplement parce que certains ont été subventionnés alors qu’en raison de l’offre et de la demande, les prix vont être finalement détériorés au détriment de ceux-là qui produisent pour vivre. Or, dans les pays où l’on produit juste parce qu’on a donné des subventions, la réalité n’est pas la même.
Donc, à la base, ces institutions-là (Omc, Onudi, Itc, Fao et Icac - Ndlr) ne devraient pas intervenir parce que les producteurs n’ont jamais eu besoin de les appeler à leur secours. C’est à partir du moment où les règles du commerce, les règles du marché international telles que fixées par l’Organisation mondiale du commerce n’ont pas été respectées en terme de subventions massives apportées, que ces pays-là ont dû se plaindre. Et donc en réponse à ces plaintes, tous ces panels d’institutions internationales ont été appelés chacune en ce qui la concerne et selon sa mission, à apporter une réponse, justement à la plainte des pays africains. Donc, c’est ce qui fait qu’on les appelle finalement institutions de soutien au développement du coton, alors qu’en terme de production, on n’avait pas besoin à la base de ces institutions pour produire si les règles du marché international étaient convenablement respectées.
Mr Nénéhidini, est-ce que vous pouvez nous donner quelques exemples de ce qui a été proposé aux pays du C4 qui ne bénéficient pas du même niveau de subvention de leurs Etats ?
Ce que je vais dire c’est que, en terme de solutions, on peut dire qu’il y en a puisque les pays du C4 sont allés à leur plainte avec un document de négociation en main sur ce qu’il faut faire. Et c’est justement parce que, au nom de la souveraineté des Etats, il y en a qui n’ont pas cru devoir y accéder, puisque l’Omc ne peut pas imposer ses règles à des pays qui n’en veulent pas. Et donc, avant qu’une solution ne soit appliquée, il faut bien que tous les Etats soient d’accord. A partir du moment où il y a des propositions faites par les Etats africains auxquelles ceux qui étaient accusés de donner des subventions ne voulaient pas accéder, et ça, c’est ce qui fait que le problème a trainé depuis plus de 20 ans, on ne peut pas s’en sortir. Je rappelle que déjà l’année dernière, on était en 2023, la directrice générale de l’Omc avait de façon pressante, demandé à ce que les pays du C4 se joignent au président du comité de négociation pour élaborer un nouveau document qui allait être validé à la dernière conférence ministérielle d’Abou Dhabi. Malheureusement, malgré ce document qui a été produit avec le président de la commission de négociation qui était l’ambassadeur turc, les mêmes pays l’ont encore une fois rejeté en se soustrayant à ce qui leur était demandé.
Du coup, on s’aperçoit de plus en plus que si on ne sort pas des solutions écrites, des solutions idylliques qui veulent que simplement des pays acceptent de se soumettre à des règles, on risque de ne pas s’en sortir, et dans 50 ans, on sera toujours là à se plaindre de subventions. Comme vous le savez, le monde actuel est une jungle. Quand bien même il y a des règles, les plus forts s’arrogent le droit de ne pas les respecter et on s’en trouve aujourd’hui à constater que nous-mêmes pays africains nous devons prendre une autre voie, et c’est celle-là qui a été abondamment discutée d’ailleurs à Cotonou : la voie de la transformation locale de nos matières premières. Parce qu’en réalité, si nous subissons de plein fouet les effets de ces distorsions créées par les subventions disproportionnées, c’est simplement parce que nous ne transformons pas localement nos productions.
Si, au lieu d’aller déverser nos cotons sur le marché international, nous travaillions à développer sur nos territoires nationaux, une industrie textile, on n’aurait pas véritablement affaire à ces distorsions qui sont vécues parce que ces cotons passent par le marché international pour aller vers les filatures textiles d’Asie. Or, si nous-mêmes nous avions nos filatures localement, nous allions faire économie de ces souffrances qu’on nous impose sur le marché international. Et là, le comportement des acheteurs de produits textiles serait absolument différent parce que là, ils viendraient en Afrique non pas pour acheter du coton, mais pour acheter des produits confectionnés ou des toiles et là, les réalités seraient différentes.
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