Suite à la déposition d’une restauratrice lundi dernier au sujet d’une conversation téléphonique estimée « suspecte » de l’ancien maire de Parakou, Rachidi Gbadamassi, dans la nuit de l’assassinat du juge Séverin Coovi, l’ancien deuxième adjoint au maire et les trois chefs d’arrondissement d’alors ont défilé dans la soirée d’hier mardi 8 juillet à la barre. Que d’inconstances dans les déclarations !
Par Claude Urbain PLAGBETO
Hier mardi, la cinquième journée d’audience dans le cadre du procès relatif à l’assassinat du juge Séverin Coovi en novembre 2005, a été une journée de repos pour les accusés présents dans le box, à savoir Clément Adétona, Raïmi Moussé et Ramane Amadou. Aucun des trois n’a été appelé à la barre pour répondre aux questions de la cour du ministère public et des avocats pour la manifestation de la vérité. En effet, suite aux déclarations faites lundi dernier par Sahada Issifou, responsable du restaurant « La belle créole », la Cour a convoqué à la barre d’anciennes autorités municipales de la ville de Parakou. Iranin Sanrigui Chabi, administrateur civil à la retraite, ex-deuxième adjoint au maire de Parakou, chargé de l’état civil et des affaires domaniales, est le premier à être interrogé.
Il confirme que c’est la mairie qui a autorisé la marche de protestation des femmes du marché contre la décision de justice dans le contentieux entre la mairie et la Société de gestion du marché de Parakou (SGMP), par rapport à la baisse des tarifs d’attribution des places du marché promise par les autorités municipales lors de la campagne électorale. Iranin Sanrigui Chabi dit ne pas faire partie de ceux qui se sont opposés à ladite décision de justice.A sa suite, le transporteur Issifou Amadou, ex-chef du premier arrondissement, a également déposé. Lui reconnaît avoir fait partie des autorités municipales ayant reçu les marcheurs à la mairie mais il affirme qu’il n’a pas fait attention aux menaces de mort dont le juge a fait objet à travers les pancartes et les tracts. Où était-il dans la soirée du dimanche 6 novembre 2005, date du crime sur le magistrat, demande la Cour ? « Le dimanche soir, on était en réunion au domicile du CA 2 (Chef du deuxième arrondissement) jusqu’au-delà de 22 heures. Après, je suis allé à « La belle créole » où j’ai joué au billard pendant une trentaine de minutes avant de rentrer directement chez moi », répond-il.
Or, il avait déclaré devant le juge que la réunion a pris fin vers minuit, lui rappellera la Cour. Il dit tout d’abord que la réunion a démarré à 19 heures avant de rectifier plus tard que c’est plutôt à 20 heures après la prière musulmane. Issifou Amadou soutient qu’il n’a pas vu le maire à « La belle créole » ce jour-là, contrairement à ce que dame Sahada Issifou, propriétaire des lieux avait déclaré la veille. « Elle a menti », objecte-t-il avant de se mettre à défendre Rachidi Gbadamassi. « Gbadamassi n’en est pour rien dans l’assassinat du juge. Mon maire ne peut jamais faire du mal à quelqu’un. Je donne ma tête à couper s’il est impliqué. C’est quelqu’un que je connais bien », jure-t-il. Me Igor Cécil Sacramento, un des avocats de la défense, sollicite une confrontation entre les deux témoins Issifou Amadou et Sahada Issifou, si cette dernière est encore à Parakou. Me Raphiou Paraïzo a demandé entre temps à la cour de rappeler le sieur Issifou Amadou à l’ordre, alors qu’il affichait « une attitude d’arrogance » à la barre. Autres contradictions Dans sa déposition, l’ancien chef du premier arrondissement de Parakou, Issifou Amadou affirme qu’ils étaient six personnes lors de la réunion tenue dimanche soir au domicile de l’ancien chef du deuxième arrondissement, Séïbou Zakari.
« Nous étions plutôt quatre : le CA1, le CA3, le maire Gbadamassi et moi-même », dira pour sa part, Séïbou Zakari. L’ébéniste Gouda François Kora, ex-chef du troisième arrondissement où le corps du juge Coovi a été découvert dans la malle arrière de sa voiture (à Zongo II), dira aussi que la réunion s’est tenue à quatre et non à six. Et à quel sujet donc ? Tous les anciens chefs d’arrondissement (CA) ont respectivement déclaré que c’était par rapport à une crise entre le premier adjoint au maire, Samou Séidou Adambi et le maire Rachidi Gbadamassi. Et que ce dernier lui avait retiré certaines de ses prérogatives, notamment la signature des permis d’habiter. A noter que tous avaient déclaré individuellement devant le juge d’instruction que la réunion a pris fin vers minuit mais hier à la barre, comme s’ils s’étaient entendus, ils ont affirmé chacun séparément que la réunion a pris fin un peu après 22 heures.
« N’est-ce pas suspect qu’une telle réunion soit tenue le soir même où l’assassinat a eu lieu et que toutes les autorités municipales avaient déclaré dans un premier temps que la réunion est terminée vers minuit et viennent à la barre dire tous que c’est peu après 22 heures ? », s’interroge Me Laurent Mafon, avocat de la défense.Comme l’ex-chef du premier arrondissement, Gouda François Kora s’est mis à défendre aussi l’ancien maire Rachidi Gbadamassi. « Tel que je le connais, tel qu’il est charitable… Il ne fait que parler du Coran et de la Bible, il ne peut pas faire du mal à quelqu’un », laisse-t-il entendre.Contrairement aux anciens chefs des premier et troisième arrondissements qui disent avoir appris la triste nouvelle dans la soirée du lundi 7 novembre 2005, l’ex-chef du deuxième arrondissement, Séibou Zakari, a déclaré que c’est dans la matinée alors qu’il allait au bureau ce lundi quand il a surpris un attroupement de personnes. Il aurait fait demi-tour et des gens lui ont appris l’assassinat du juge Séverin Coovi et que les autorités compétentes étaient déjà passées pour le constat. La découverte macabre n’a été faite qu’en début d’après-midi, fera observer le ministère public, Pascal Dakin.
Alors que Gouda François Kora avait déclaré devant le juge d’instruction que c’est par son chauffeur qu’il avait appris la mort tragique du magistrat, à la barre hier il a confié plutôt que c’est par des usagers de l’arrondissement et à travers les médias qu’il a été informé.Les débats se poursuivent ce mercredi avec la comparution d’autres témoins.
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9 juillet 2014 par Judicaël ZOHOUN