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Le Bénin bat le record de maires suspendus et/ou destitués. Mais loin d’être l’expression d’une rigueur en vigueur au sein des conseils communaux, ce cafouillage traduit malheureusement une calamité dans la gestion des communes urbaines et rurales. De la dizaine des élus destitués, aucun n’a été traduit devant les tribunaux. Ceux-ci continuent de se pavaner, comme si de rien n’était. A qui la faute, si la décentralisation est sapée à la base ?
(Par Gontran Vidjinnagni)
A priori, on peut croire que les conseils communaux jouent bien leur rôle de « gendarmes des collectivités locales » en prononçant des destitutions et/ou des révocations de maires indélicats avec la bénédiction de l’autorité préfectorale.
Ou encore, en dissolvant des conseils municipaux qui ne fonctionnent pas bien. Ainsi a-t-on assisté, ces dernières années, à moult fatwas qui sont tombés autant à l’encontre de communes rurales que de communes urbaines, de « petits maires ruraux » que de présumés intouchables. Mais l’autorité n’a jamais osé aller plus loin que le verdict préfectoral. A quoi sert donc de prendre une sanction qui ne se traduit jamais dans le champ du concret ?
A quoi joue finalement l’Etat ? Malgré les accusations suffisamment crues, ces maires destitués n’ont presque jamais été inquiétés. Du moins, ils ne font l’objet de procédures judiciaires dignes de ce nom. Ils vont et viennent et il n’y a rien au village. Certains même continuent de tirer les ficelles de leur ancienne position. Et cela saute tellement aux yeux qu’on se demande si l’Etat ne se rend pas complice de la mal gouvernance en se limitant curieusement à des contrôles de principe.
En tout cas, cette façon de sanctionner la gestion des maires sans le faire effectivement est si licencieuse que ce n’est pas ce qui semble inquiéter le plus. Bien au contraire, cela ne fait que renforcer, au sein des populations, un sentiment d’impunité qui ravive malheureusement l’envie de se faire justice elles-mêmes.
C’est, du reste, ce que l’on a vu dans certaines communes où des jeunes, qui soupçonneraient leur maire de « gestion opaque », choisissent, arbitrairement, de mettre le feu au domicile de l’édile et à certains biens de la commune. Or, cette folie incendiaire aurait pu être évitée, pour peu que ces jeunes aient le sentiment de pouvoir légitimement demander des comptes à leur maire. Mieux, aussi longtemps qu’on n’aura pas, effectivement, poursuivi ces maires révoqués, leurs administrés n’auront d’autre recours que de se rendre justice eux-mêmes.
Malheureusement, ce n’est pas demain la veille. Après près de deux décennies d’un processus de décentralisation dont les fruits sont encore trop pâles pour convaincre, il faut changer le fusil d’épaule. Surtout en matière de sanction, mais aussi du choix des hommes et des femmes dont l’étoffe de probité et d’intégrité est suffisamment épaisse pour insuffler un développement véritable.
On en a marre de ces maires qu’on révoque sans véritablement les sanctionner. Aussi longtemps que durera cette comédie, il sera bien difficile d’exorciser les collectivités locales du virus de l’affairisme et la boulimie du pouvoir qui est à l’origine de tous les problèmes au niveau de l’Etat.
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