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Lutte contre les ravages du jasside :

L’Omc et la Fao au chevet du coton africain




L’Omc avait prévu d’examiner le rapport de la Fao sur la réponse aux défis posés en Afrique de l’Ouest et du Centre par les ravages de la cicadelle du coton ou jasside, au cours de la 40ème série de consultations sur l’aide au développement en faveur du coton, du Mécanisme du Cadre Consultatif du Directeur général sur le Coton du 7 novembre 2023 à Genève. Mais ce rapport n’ayant pu être présenté et vu la gravité des infestations des champs et des pertes de récoltes qui ont affecté les économies nationales, un atelier-webinaire d’experts a eu lieu hier mardi 26 mars 2024, pour évaluer les mesures mises en place et proposer des solutions urgentes à soumettre sous forme de projets aux bailleurs de fonds, en vue de maîtriser ce « Covid du coton ».

Jocelyn N. NÉNÉHIDINI
Politiste–Business Consultant

Les producteurs africains de coton gardent le douloureux souvenir des ravages de leurs cultures, dès la fin des années 90, par la chenille Helicoverpa armigera dont la résistance aux insecticides synthétiques, les pyréthrinoïdes, a conduit les services de recherche à recommander le recours à l’Endosulfan à forte dose. Malheureusement à cette époque, la mobilisation internationale n’était pas suffisante pour sauver les vies humaines et épargner l’environnement des risques d’empoisonnement et de dégradation induits de ce traitement alternatif. Aujourd’hui, l’Omc et la Fao s’impliquent dans la recherche des solutions aux ravages du jasside, au grand bonheur des pays producteurs et de l’Association cotonnière africaine (Aca). Les jassides ne sont pas d’apparition nouvelle dans les pays cotonniers d’Afrique. En 2017, un collectif de huit chercheurs ivoiriens publiait une étude sur l’évolution spatiale et temporelle des dégâts du jasside Jacobiella fascialis (Cicadellidae), en comparaison avec la distribution de la pluviométrie au cours des vingt dernières années, dans les zones de culture cotonnière en Côte d’Ivoire (Koné & al., 2017). Mais cette espèce habituelle de jasside en net recul, a fait place en Afrique de l’Ouest et du Centre à un nouveau biotype dénommé Amascara biguttula ou cicadelle du coton indien ou jasside.

Sous la modération du Professeur Emmanuel Sekloka, Directeur de l’Institut de Recherche sur le Coton du Bénin (Irc), l’atelier-webinaire du mardi 26 mars 2024 a été conjointement ouvert par Jean-Marie Paugam, Directeur général adjoint de l’Omc et Dominique Burgeon, Directeur du Bureau de liaison de la Fao auprès des Nations-Unies à Genève. L’objectif de ces deux institutions organisatrices est de procéder à un diagnostic exhaustif de la situation des ravages, à une appréciation du niveau de succès des réactions mises en œuvre et à une identification des défis restant à relever. Ces derniers seront traduits en projets respectueux de l’Agenda 2030 pour le développement durable, à soumettre aux bailleurs de fonds en vue des actions urgentes à déployer pour contrôler définitivement Amascara biguttula dans les pays africains, comme ils ont fini depuis des années par maîtriser Hélicoverpa Armigera.

Réaction des chercheurs africains face à l’invasion

Les agressions de la cicadelle du coton ont commencé timidement en 2020 pour s’intensifier progressivement jusqu’à la campagne 2022-2023 avec pour épicentres, le Mali, le Sénégal, le Burkina-Faso, la Côte d’Ivoire, le Togo, le Bénin, le Cameroun et le Tchad, entraînant des pertes variant 26% et 60% des récoltes. Selon la Fao, si les pertes en Côte d’Ivoire ont été estimées entre 30-40%, le Mali a perdu en 2021/2022 en plus de 91.256 ha emblavés, 51% de sa production, tandis que le Bénin et le Burkina-Faso signalaient des taux d’infestation anormalement élevés. Confrontés à ces lourdes pertes évaluées en 2022/2023 à 215 milliards de Fcfa pour tous ces huit pays membres du Programme régional de production intégrée du coton en Afrique (Pr-Pica), ils ont déclenché dès août 2022 à travers ledit programme, des initiatives internes qui ont été inscrites à l’ordre du jour de la 19ème assemblée générale de l’Association cotonnière africaine (Aca) tenue à Accra au Ghana en mai 2023. Le Pr-Pica et l’Aca, il faut le souligner, n’étaient pas encore actives à l’époque de l’Hélicoverpa armigera.

Ces initiatives mises en œuvre sous l’impulsion du Pr-Pica vont du traitement des semences par des doses d’insecticides systémiques (quatre produits à base de thiaméthoxame) au traitement foliaire par un produit à base de flonicamide, qui se sont révélés efficaces et ont été utilisés pour la campagne 2023/2024, en passant par d’autres moyens de lutte. Il s’agit d’abord de la fumure organo-minérale optimale qui permet au plant bien nourri d’être plus résistant aux cicadelles qui l’attaquent par succion de sève ; ensuite de l’utilisation d’un régulateur de croissance du cotonnier ou écimage du cotonnier qui rendent les plants plus vigoureux et donc plus résistants aux jassides ; et enfin de l’utilisation de pièges jaunes collants (à glue) qui freinent l’extrême mobilité de la cicadelle, grande à taille adulte, de 3 mm seulement. Ces pièges ne constituent pas un traitement curatif mais plutôt préventif parce que juste permettant de visualiser les niveaux d’infestation. La hausse de la production du Mali (pays le plus frappé par les jassides) qui a ravi à l’occasion au Bénin la tête des producteurs africains au titre de la campagne 2023-2024, n’est pas sans lien avec lesdites initiatives. Toutes ces réactions ont été assorties de mesures prises en matière, entre autres, de mise à disposition à bonne date des produits identifiés aux producteurs ; d’amélioration de l’enrobage des semences délintées ; de poursuite de la sensibilisation des producteurs quant à la réalisation des traitements de façon groupée pour les parcelles d’un même bloc de culture et d’éloignement d’autres cultures maraîchères, elles aussi hôtes favorites des jassides à savoir le gombo, l’aubergine, le piment.

Restaient irrésolus les défis que constituent l’étude de la bioécologie spécifique aux conditions locales en rapport avec la cicadelle du coton qui est d’origine asiatique ; la caractérisation moléculaire des échantillons collectés et l’identification des souches ; la poursuite de la recherche de nouveaux produits ou éléments de lutte agronomique et biologique en l’occurrence la sélection des variétés de plants à pilosité et des ennemis naturels du jasside ; et la mise en place d’une stratégie de gestion intégrée et durable de l’ensemble des ravageurs, en vue d’habituer les producteurs et les sociétés cotonnières à vivre avec ce bio-agresseur de type nouveau par une meilleur maîtrise de son comportement. Sans occulter le défi induit concernant la sécurité alimentaire compte tenu des cibles que constituent plusieurs produits maraîchers pour ce ravageur et des traitements chimiques utilisés pour le combattre.

Action publique internationale anti-jasside

En soutien à toutes ces initiatives et afin de d’aider les producteurs à « porter à la tête, le fardeau posé au genou » comme on dit en Afrique, les institutions multilatérales ont inscrit à leur agenda, la mobilisation de leurs partenaires en faveur de cette lutte qui devrait s’intensifier. Dans cette veine, la task force régionale (composée des instituts de recherche des points focaux désignés par les ministres de l’agriculture) mise en place par la Fao pour lutter contre les bioravageurs, réunie à Cotonou du 03 au 06 juillet 2023, a inscrit la lutte anti-jasside à son ordre du jour. A la faveur d’un atelier international piloté par son bureau sous-régional de Dakar, une quarantaine de chercheurs ont fait le suivi dans les Champs Écoles Paysans (Cep) de Toffo de la mise à échelle des technologies Ipm (Integrated pest management) et se sont engagés dans le combat contre les jassides. Dans ce cadre, un manuel sur la gestion intégrée a été conçu pour améliorer les connaissances sur ce ravageur qui n’existaient que dans la littérature, vu son origine indienne. Les pratiques de lutte agronomique proposées pas la Fao visent en priorité l’interdiction de rotation ou d’association culturale avec les autres plantes hôtes (kénaf, gombo, piment, aubergine, etc.) ; le choix des variétés de cotonnier à forte pilosité pour éviter la ponte des œufs, l’observance d’une densité moyenne champs pour optimiser les traitements, l’écimage, les semis à bonne date synchronisés dans la même zone de culture et la destruction des vieux cotonniers.

En ce qui concerne les stratégies de lutte biologique intégrée, elles se fondent sur les concepts de prédation, de parasitisme et de phytophagie et sont construites autour de trois approches : la lutte biologique par conservation, celle augmentative et celle classique. La première vise à rechercher localement les ennemis naturels des jassides et les développer. Il s’agit des parasitoïdes comme les coccinelles, punaises, guêpes, chrysopes, etc. dont il faut favoriser l’alimentation sous réserve de bien les connaître. La seconde est par avance handicapée par la méconnaissance des ennemis naturels des jassides. La troisième, classique, qui vise l’importation et l’introduction d’un ennemi nuisible exotique pour mieux contrôler un ravageur lui-même exotique, trouve des exemples réussis en Afrique avec la cochenille du manioc et celle du papayer. Mais cette stratégie est confrontée au processus long et coûteux (de 5 à 10 ans pour importer un ennemi nuisible et l’intégrer). La Fao reconnaît l’urgence et la lourdeur des études à effectuer sur les parasitoïdes en vue des luttes biologiques. L’atelier-webinaire a informé des travaux avec l’Institut international d’agriculture tropicale (Iita) du Bénin dont l’étude préliminaire sur l’identification d’un champignon entomopathogène de Amrasca biguttula a permis de constater sur le terrain, des jassides morts à cause desdits champignons.

La Fao a aussi travaillé avec le Centre international de physiologie et d’écologie des insectes (Icipe) basé à Nairobi dans le cadre d’un projet de modélisation et de cartographie des risques associés aux jassides. Il s’agit d’un outil pragmatique de prédiction des zones à risque bâti sur la base des données obtenues en Asie, ajustées avec celles de l’Afrique de l’Ouest et du Centre. Il pourra servir de système d’alerte précoce à la disposition des décideurs en vue d’une priorisation des zones à risque. Cet atelier-webinaire aura permis de constater la promptitude et l’efficacité des chercheurs africains qui, sans grands moyens, ont proposé des solutions immédiates qui ne s’écartent pas de celles proposées par les acteurs publics internationaux. Ces solutions de première main restent cependant à être affinées à travers des projets recensant les défis à relever et les coûts induits, qui feront l’objet de notes conceptuelles à soumettre aux bailleurs de fonds et partenaires techniques de la l’Omc et de la Fao dans la perspective de terminer la lutte contre les jassides.

Jocelyn N. NÉNÉHIDINI

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