Personne pour sauver les élections au Bénin ? 17 mois que les municipales sont en souffrance. Rien ne garanti les législatives constitutionnellement prévues pour avril 2015 ; incertitude par ricochet sur la présidentielle de 2016. Aucun coupable désigné face au précipice dans lequel tout le processus démocratique se trouve projeté. La Cena n’est coupable de rien ; elle a certes été installée tardivement mais elle aurait déjà fini d’élaborer son budget même si ses membres se tournent les pouces faute de fonds de roulement disponibles et de bureaux. Le Cos/Lépi enchaine les chronogrammes et les appels de fonds infructueux sans lendemain. La Cour constitutionnelle veille à ce que jamais les Béninois ne retournent aux urnes tant que la fameuse Liste électorale permanente informatisée (légalement inexistante) ne soit disponible. Le ministre des Finances attend de connaitre l’usage fait de l’argent déjà décaissé au profit du Cos/Lépi. La classe politique, toutes tendances confondues, intrigue comme d’habitude. Les travailleurs grognent de temps en temps mais subissent. Les citoyens attendent en spectateurs joyeux. Tous responsables mais pas coupables, comme dirait l’autre.
De gens décidés à faire organiser les élections, et tout de suite (ne serait-ce que pour les municipales), difficile d’en dénicher dans cette nation de compromissions. Pendant que les rendez-vous électoraux balbutient, il y a bien d’autres enjeux qui prospèrent grâce à la détermination et l’abnégation des concernés. En effet, lorsqu’il a plu au gouvernement de tenir une table ronde à Paris, les moyens ont été trouvés illico ; idem pour les tournées gouvernementales de pose de pierre, de lancement de travaux ou de remerciement au chef de l’Etat. Lorsque le droit de grève des magistrats fut menacé, une mobilisation exceptionnelle a vite fait de contraindre le parlement à abdiquer. Ne parlons pas de la riposte mémorable des travailleurs après les scènes d’horreur de décembre 2013 à la bourse du travail : 4 mois de paralysie générale de l’administration publique pour aboutir à la restitution des retenus sur salaire pour fait de grève, à la poursuite devant les tribunaux du préfet de l’Atlantique-Littoral et au retrait de tous les arrêtés préfectoraux d’interdiction de manifester.
On peut multiplier les exemples de grands défis vaincus par des gens qui se sentaient directement concernés. Des rois au chevet de marchés publics à polémique ; le président de l’Assemblée nationale en croisade pour une bretelle routière d’à peine 1,5 Km dans son Bopa natal ; des maires prolongés indéfiniment à la tête de leur commune marchant pour soutenir l’honneur du chef de l’Etat prétendument écorché ; des ministres en démonstration de richesse lors des meetings quotidiens itinérants ; les transporteurs capables de faire lever la plupart des péages-policiers sur toute l’étendue du territoire national… Mais personne pour la mobilisation générale en vue de lever les blocages sur le chemin des isoloirs. Comme si le combat pour la tenue des élections à bonne date est moins important que la défense du droit de grève des magistrats, la levée des interdictions de marche, la rétrocession des prélèvements sur les salaires des fonctionnaires grévistes.
Il manque finalement à ces scrutins bloqués ou menacés cet accompagnement citoyen d’envergure à l’instar d’une grève générale, d’une table ronde gouvernementale, des tournées des ministres, des sit-in de jeudi au palais des gouverneurs, des mercredis rouges, des marches de maire, des prêches enflammés dans les églises, des conférences de presse, des universités de vacances de parti etc… La question est de savoir si les Béninois font assez pour recouvrer le droit d’aller aux urnes, un droit que les sages de leur Cour constitutionnelle conditionnent désormais à l’achèvement d’un fichier électoral ultrasophistiqué.
A chacun sa priorité patriotique…
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15 septembre 2014 par Judicaël ZOHOUN